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05/01/2014

Je ne sais plus pourquoi je t'aime (G. ZEVIN)

«S’il en était allé autrement, je m’appellerais Natalia ou Natacha, et j’aurais l’accent russe et les lèvres gercées toute l’année. »

IMG_0884.JPGAprès une chute dans les escaliers de son lycée, Naomi a perdu la mémoire des quatre dernières années de sa vie. Elle découvre à son chevet James, qui lui plaît beaucoup et qui n’est pas du tout son petit ami. Pire encore, elle ne se reconnaît pas dans le portrait qu’on lui fait d’elle : élève populaire et casée avec un sportif. Si Naomi se sent comme une étrangère, aux autres et à elle même, elle se laisse aller avec humour et inquiétude vers ce qu’elle a envie d’être. Au risque de perdre sur certains tableaux mais de gagner sur d’autres…

Une fois de plus, Gabrielle ZEVIN réussit à merveille à capturer les hésitations de la période adolescente. Mais cette fois-ci, elle a accru la difficulté en rendant son héroïne amnésique dès les premières pages du roman. Lorsqu’elle revient à elle après sa chute, Naomi a oublié les quatre dernière années de sa vie et doit tout reconstituer, se frayant un chemin avec les dits et les non-dits. Ses parents ont divorcé, elle a un petit ami champion de tennis qui la laisse indifférente, elle devine que la Naomi de ces dernières années n’est pas celle qu’elle croyait être, beaucoup de choses se télescopent en elle, avec brutalité.

A la fois léger et plus sérieux, drôle mais un peu effrayant, Je ne sais plus pourquoi je t’aime est une très jolie surprise.

- Tout finit par s’oublier, de toute manière. D’abord, on oublie tout ce qu’on a appris : les dates de la guerre de Cent Ans, le théorème de Pythagore. On oublie surtout tout ce qu’on n’a pas vraiment appris mais qu’on a juste mémorisé la veille au soir. On oublie les noms de pratiquement tous ses profs à part un ou deux, qu’on finira par oublier eux aussi. On oublie son emploi du temps de première, sa place dans la classe, le numéro de téléphone de son meilleur ami et les paroles de cette chanson qu’on a bien écoutée un million de fois. Pour moi, c’en était une de Simon & Garfunkel. Qui sait laquelle ce sera pour toi ? Et finalement, mais lentement, tellement lentement, on oublie ses humiliations… même celles qui semblaient indélébiles finissent par s’effacer. On oublie qui était branché et qui ne l’était pas, qui était beau, intelligent, sportif ou pas. Qui est allé dans une bonne fac. Qui donnait les meilleures fêtes. Qui pouvait vous trouver de l’herbe. On les oublie tous. Même ceux qu’on disait aimer, et même ceux qu’on aimait vraiment. Ceux-là sont les derniers à disparaître. Et ensuite, une fois qu’on a suffisamment oublié, on aime quelqu’un d’autre.

Gabrielle ZEVIN, Je ne sais plus pourquoi je t’aime

Albin Michel - Wiz

 Paru en 2009 - 400 pages – 16 €

Paru en 2012 en poche – 6,90 €

L’auteur : Gabrielle ZEVIN vit à New York. Elle a travaillé comme scénariste. Elle est l'auteure de Une Vie ailleurs (Wiz, 2012), La Mafia du chocolat (Wiz, 2012) et La Fille du parrain.

15:14 Publié dans Vie quotidienne | Lien permanent | Tags : adolescente, zevin, amnésie | |  Facebook | | |

29/01/2013

Une vie ailleurs (G. ZEVIN)

« La fin a été rapide, et elle n’a pas souffert. »

Liz Hall, quinze ans, vient de mourir dans un accident de vélo. Elle se retrouve sur Ailleurs, un lieu où les défunts rajeunissent jusqu'à redevenir bébés avant de repartir dans le grand cycle de l'humanité... Pour Liz, qui rêvait d'atteindre enfin ses seize ans, le choc est brutal. Car elle n'a aucune envie de rajeunir. Ce qu'elle voulait, c'était décrocher son permis de conduire. Entrer à la fac. Connaître le grand amour. Il va pourtant lui falloir faire le deuil de son ancienne vie sur Terre avant de trouver un sens à cette nouvelle existence...

Étonnant roman que cette Vie ailleurs : sur un sujet a priori abracadabrantesque, un bateau qui emmène les morts sur une île, les fait rajeunir, avant de les renvoyer sur terre se réincarner, Gabrielle ZEVIN produit un roman plein de charme, de tendresse et de poésie. Son héroïne, quoique morte, est restée l’adolescente un peu butée qu’elle était ante mortem et en fait voir de toutes les couleurs à ceux qui l’accueillent dans ce nouvel « ailleurs » où elle n’a pas demandé à venir.

Il lui faudra faire le deuil des choses qu’elle ne connaîtra jamais vivante, mais accepter de les découvrir une fois morte, avec cet angle un peu biaisé de passer sur des traces qui ont déjà été faites. Les relations humaines ne sont pas moins complexes parce qu’on est passé de l’autre côté et il faut apprendre à vivre (!) avec la souffrance d’avoir laissé ceux que l’on aimait dans la douleur, renoncer à vouloir les consoler (au risque de tout empirer…) et accepter de les voir continuer leur vie sans nous.

Regorgeant de jolies trouvailles, ainsi, sur Ailleurs, on n’exerce pas de métier mais on a une « vocation », on parle avec les chiens, présentant des personnages secondaires aussi attachants que l’héroïne, Une vie ailleurs est un très joli roman.

Lise avait été heureuse. C'était extraordinaire… Pendant tout son séjour sur terre, elle ne s'était pas considérée comme quelqu'un de particulièrement heureux. Comme beaucoup de gens de son âge, elle avait été sujette à des sautes d’humeur et à des coups de cafard dont elle trouve aujourd’hui les raisons totalement stupides : elle n’avait pas été la coqueluche du lycée, elle n’avait pas de petit ami, son frère lui tapait parfois sur le système, et elle avait des taches de rousseur. A de multiples égards, elle avait vécu comme si elle attendait que toutes les choses bien arrivent : habiter seule, aller à la fac, conduire une voiture. Aujourd’hui, Liz voir enfin la réalité en face. Elle avait été heureuse. Heureuse, heureuse, heureuse. Ses parents l’avaient aimée ; sa meilleure amie avait été la fille la plus compréhensible et la plus merveilleuse du monde ; le lycée avait été facile ; son frère n’avait pas été si abominable que ça ; son carlin s’était plu à dormir à côté d’elle dans le lit ; et puis, oui, elle était même passé pour jolie. Jusqu’à une semaine plus tôt, sa vie s’était déroulée sans la moindre anicroche. Son existence avait été heureuse et simple, et maintenant cette existence était terminée.

Gabrielle ZEVIN, Une vie ailleurs

Albin Michel - Wiz

320 pages – 14,20 €

Paru en 2012 en poche – 6,90 €

L’auteur : Gabrielle ZEVIN vit à New York. Elle a travaillé comme scénariste. Elle est l'auteure de et Je ne sais pas pourquoi je t'aime (Wiz, 2009) et La Mafia du chocolat (Wiz, 2012).