19/11/2010
Un Endroit où se cacher (J. C. OATES)
« Suis allée quelque part et, à mon retour, maman n’était plus là. »
Jenna est l’unique rescapée d’un accident de voiture qui a vu périr sa mère. Lorsqu’elle revient à elle, baignant « dans le bleu » de l’inconscience médicamenteuse, elle est en miettes, physiquement et moralement. Sa famille éclatée se presse autour d’elle et, déjà, elle exprime ce qu’elle veut : ne pas partir vivre avec son père, parti refaire sa vie en Californie et qui les a tant fait souffert, sa mère et elle. C’est donc sa tante Caroline qui va l’accueillir dans sa famille. Changement de maison, de lycée, d’amis, de vie, tout est brutal pour Jenna qui ne parvient pas à s’adapter. Sans compter la douleur, physique et morale, et les calmants auxquels elle n’a bientôt plus droit…
Joyce Carol OATES a réussi avec cet Endroit où se cacher à se glisser dans la peau d’une adolescente meurtrie qui ne parvient pas à saisir les mains qui se tendent. A la fois entourée et très seule, son héroïne se débat entre la tentation du vide et la lucidité qui fait qu’elle se voit agir mais ne peut s’empêcher de se laisser glisser sur la pente dangereuse.
L’écriture est hachée, mêlant monologue intérieur et narration plus classique, mais cependant jamais le lecteur n’est perdu car un fil invisible sous-tend l’ensemble. Et c’est de cette tension entre le désir de retour vers « le bleu », cet état d’origine, celui où elle retrouverait sa mère, et l’appel de la vie, avec l’amour des siens, qu’elle perçoit ne peut accepter, que naît tout l’intérêt de l’histoire. Roman subtil, difficile parfois, c’est un très beau témoignage du travail de deuil et de résilience.
Ne me parlez pas ne me touchez pas !
Je m’efforce de me rappeler que je l’aime, ma « nouvelle » famille.
Ma tante Caroline et mon oncle, Dwight McCarty. Mes petits cousins Becky et Mikey.
Et ma nouvelle chambre, la chambre d’amis du premier étage, où j’avais coutume de dormir quand maman et moi venions rendre visite aux McCarty. Soudain, alors que je commence à défaire mes bagages et à pendre mes affaires dans le placard, je réalise que la dernière fois que je me suis trouvée dans cette même chambre à défaire ma valise, en août il y a un an de ça, maman était tout près… En train de défaire ses bagages dans sa chambre à elle, peut-être, ou en bas, avec tante Caroline. J’ai reformulé mon souhait, rouge de colère : je veux qu’on me rende ces moments-là !
Le temps présent, je le déteste. Je tremble et j’ai la nausée.
Joyce Carol OATES, Un Endroit où aller.
Wiz – Albin Michel
300 pages – 13,50 €
Titre original : After the Wreck, I picked myself up, spread my wings and flew away – Paru en 2006 – Traduit en français en 2010
L’auteur : Auteur de nombreux best-sellers, Joyce Carol OATES a commencé à écrire à quatorze ans. Elle a publié des romans, des essais, des nouvelles et de la poésie. Son roman Blonde, inspiré de la vie de Marylin Monroe, a connu un immense succès. Joyce Carol Oates enseigne également la littérature à l'université de Princeton.
Site internet : http://www.harpercollins.com/author/microsite/about.aspx?authorid=7275
09:42 Publié dans Vie quotidienne | Lien permanent | Tags : albin michel, wiz, oates, deuil, résilience, mère, mort, adolescence | | Facebook | |
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