23/06/2011
Tout près, le bout du monde (M. LETHIELLEUX)
« Le plus difficile, c’est de commencer.»
Ils sont trois « bras cassés » de la vie qui débarquent un beau jour de novembre dans la ferme de Marlène, le bout du monde. Placés par l’institution, c’est une reconstruction par le travail qu’on leur propose : Marlène retape une vieille grange et ils doivent l’aider. Il y a Malo, le plus jeune, Julie et Solam. La règle est de chaque soir écrire une page, thérapie par l’écriture. C’est ainsi que va se dérouler le roman, à travers les trois voix qui d’abord déraillent avant peu à peu de se mettre à l’unisson.
La force du roman est d’abord sa construction tout en subtilité : en faisant le choix de laisser la parole à ses personnages, Maud LETHIELLEUX leur donne vie, leur donne voix, les rend tour à tour attendrissants, agaçants ou amusants. Loin de dire tout tout de suite, elle laisse le lecteur lentement cheminer à travers l’histoire de chacun, sans jamais juger ou influer. Le personnage de Marlène n’existant qu’à travers les témoignages des trois est notamment peu à peu dessiné, émergeant petit à petit, en filigrane du texte.
Une fois de plus, Maud LETHIELLEUX laisse parler sa tendresse envers les laissés-pour-compte, les marginaux, ceux que la société condamne sans prendre le temps de comprendre et, si certains passages peuvent horripiler, comme horripilent certaines personnes, d’autres savent aller droit au but et l’on referme le livre avec beaucoup d’émotion. Tout près, le bout du monde est une belle réussite.
Évidemment j’y ai pensé mais j’avais trop envie d’une vraie bouffe, avec du gras, tu vois, de la crème fraîche et des lardons, pas avec ton huile d’olive bio et tes oignons coupés gros comme ça. Comme je me suis pas gêné et comment t’as rien dit quand je t’ai dit de t’arrêter devant la supérette !
Après tous les ordres que tu nous as donnés pour tes putains de travaux, je me suis bien défoulé : épluche les châtaignes ! Y reste de la mousse sous le bolet !
N’empêche, t’as tout fait comme il faut. T’es plus docile que j’aurais pensé.
Au moins maintenant tu sais que même dans ta cuisine de Cro-Magnon on peut faire de la vraie bouffe. T’as entendu qu’on entendait rien pendant tout le repas ? T’as vu comment l’anorexique était plus anorexique ?
Maud LETHIELLEUX, Tout près, le bout du monde.
Éditions Flammarion - Tribal
510 pages – 10 €
Paru en 2010
L’auteur : Maud LETHIELLEUD est musicienne et metteur en scène. Elle a parcouru le monde, de l’Asie à la Nouvelle-Zélande. Elle a publié Dis oui, Ninon chez Stock en 2009, puis D’où je suis, je vois la lune, son deuxième roman. Après J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait, Tout près, le bout du monde est son deuxième roman pour la jeunesse.
Site de l’auteur : http://maudetlesmots.free.fr
09:43 Publié dans Vie quotidienne | Lien permanent | Tags : flammarion, tribal, lethielleux, adolescent, rupture, amitié, résilience | | Facebook | |
Les commentaires sont fermés.