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18/05/2010

La Douane volante (F. PLACE)

La douane volante.jpg« La Bretagne, c'est ce grand bout de granit qui termine la France, à l'extrême pointe du continent : Finis Terrae, disent les savants.  »

En 1914, Gwen a quatorze ans. Ne sachant que faire de cet adolescent maladif et souffreteux, sa mère le place chez le vieux Braz, un rebouteux, qui va lui transmettre son savoir. Mais le vieux Braz va mourir et bientôt, la charrette noire de l'Ankou viendra chercher Gwen pour l'emmener dans un étrange pays, où règne la Douane volante, où la langue est ancienne, où Gwen l'Egaré va se révéler un guérisseur recherché.

Étrange roman que celui de François PLACE. Initiatique, onirique, inquiétant, le récit est tout à la fois. A la suite de Gwen, narrateur de son histoire, nous pénétrons dans un monde qui n'est ni tout à fait le même, ni tout à fait différent du nôtre, où les passions sont toutes aussi violentes mais où les frontières semblent anéanties. C'est un monde dont on ne sort pas. Mais d'ailleurs, comment y est-on entré ?

La mer est omniprésente, s'immisçant jusque dans les canaux de ses villes que l'on devine du Nord, la déliquescence aussi, les vapeurs d'alcool, il est très difficile de se repérer dans cet ouvrage unique : car derrière  cet univers trouble comme à travers une vitre de verre dépoli, on devine notre monde bouleversé, celui de la Grande Guerre de 14-18 et ses « jardins de fer », « comme si l'étoffe du temps pouvait se déchirer ».

François PLACE dit avoir voulu retrouver l' « atmosphère hollandaise du XVIIe : une terre plate, un monde rural » : il a placé son héros au cœur d'une toile où il le regarde apprendre à s'en désengluer. Est-on dans le rêve, dans la réalité ? Lui-même affirme avoir voulu « retrouver des visions du monde qui ne [soient] pas seulement rationnelles ». Son roman peut déranger le lecteur de quinze ans et plus dans ses repères traditionnels, mais il mérite cependant que l'on s'y plonge.

On allait cueillir des plantes avant l'aube. Il appelait ça les « simples », et moi je trouvais ça compliqué. Il en prenait une dans ses grandes mains noueuses, il la nommait de sa voix caverneuse, il frottait une feuille, la portait à son nez, et m'enjoignait de retenir son odeur. Il m'obligeait à distinguer chaque partie, à compter les pétales ou les lobes, à en goûter la sève. Il me faisait déterrer des racines, les nuits de pleine lune, qu'il fallait faire bouillir, ou bien réduire en poudre. On faisait aussi des choses un peu moins propres, avec des vers, des larves de ceci ou de cela qui se tortillaient sur du gros sel avant de finir broyées dans un mortier. Lui, rien ne le dégoûtait, sauf la connerie des hommes, selon ses propres mots.

François  PLACE, La Douane volante.

Gallimard Jeunesse

334 pages - 13,50€

Paru en 2009

L'auteur : François Place, né en 1957, a étudié à l'école des arts et industries graphiques Estienne à Paris, avant de travailler comme illustrateur, d'abord pour la publicité, puis pour l'édition jeunesse. En 1992, il passe à l'écriture de fiction avec un premier album remarqué «Les derniers géants», couronné par de nombreux prix. Son atlas imaginaire, «L'Atlas des géographes d'Orbæ», qui explore ving-six pays cartographiés comme des lettres de l'alphabet, est paru en trois tomes, entre 1996 et 2000. Il a reçu également plusieurs prix, dont un à la foire internationale de Bologne et un prix spécial «sorcières» décerné par les libraires jeunesse. Son dernier album, «La fille des batailles», a reçu le baobab du salon du livre de Montreuil. Ses albums parlent de l'ailleurs, des voyages, de la rencontre. Comme illustrateur, il a collaboré avec des auteurs comme Michael Morpurgo, Erik Lhomme, Timothée de Fombelle. Il a également travaillé pour le site internet jeunesse du musée du Louvre. En janvier 2010 est paru son premier roman «La Douane volante».