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06/02/2013

Merlin - Les années oubliées (T.A. BARRON)

« Une vague sombre se dressa sur la mer, et de cette vague jaillit une petite main. »

Le jeune Emrys ignore tout de son identité. Ses premiers souvenirs remontent à l’âge de sept ans, lorsqu’il s’est réveillé sur une plage…
Une femme guérisseuse, Branwen, prétend être sa mère. Mais il refuse de la croire. Devenu adolescent, Emrys est déterminé à découvrir qui il est. D'autant qu'il s'est mis à développer des pouvoirs hors du commun, qu'il ne parvient pas à contrôler. Sa quête va alors le mener sur la mystérieuse île de Fyncaria, peuplée de créatures aussi merveilleuses qu'inquiétantes.

Premier volume d’une trilogie, ce Merlin - Les années oubliées s’attache à faire découvrir l’enfant, puis l’adolescent derrière le mythe. En un mot, comment un jeune orphelin de père – ou croyant l’être – sans passé, sans mémoire, est devenu l’enchanteur Merlin

Le roman baigne dans la mythologie celtique, la nature, à la fois magnifiée et cependant en danger, est omniprésente, personnage à part entière de cette histoire où les humains et ceux de l’autre monde s’affrontent, parfois entre eux même. Emrys fera de belles rencontres, d’autres plus dangereuses, mais, petit à petit, se construira et deviendra l’être exceptionnel qui a marqué les mémoires – et la littérature…

J'ai eu une soudaine envie de sonder son esprit, comme si c'était l'intérieur d'une fleur. Mais les flammes se sont rallumées dans la tête. Alors, je me suis souvenu de ma promesse, mais aussi de mes peurs.

- Dis-moi juste une chose, ai-je supplié. Tu m’as raconté un jour que tu avais connu mon grand-père. Connaissais-tu aussi mon père ?

Branwen tressaillit.

– Oui, je le connaissais.

- Etait-il… Enfin, était-ce un humain ? Était-ce… Un démon ?

Tout son corps s’est raidi. Après un long silence, elle a répondu d’une voix qui semblait venir de très, très loin.

– Je te dirai seulement ceci : si jamais je devais rencontrer un jour, rappelle-toi : il n’est pas ce qu’il paraît être.

- Je m’en souviendrais. Mais ne peux-tu rien me dire de plus ?

Elle a secoué la tête.

– Mon propre père ! Je veux juste le connaître.

– Il ne vaut mieux pas.

– Pourquoi ?

Au lieu de répondre, elle a secoué la tête tristement et s’est dirigée vers la table où était posée sa collection de plantes médicinales. Elle en a ramassé quelques-unes, les a pilées grossièrement, puis a versé la poudre dans une sacoche en cuir suspendue à une corde. Elle m’a donné la sacoche et m’a dit d’un ton résigné :

– Cela t’aidera peut-être à vivre un peu plus longtemps.

T. A. BARRON, Merlin

Nathan

368 pages – 15,50 €

Paru en 2013

Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092539545

L’auteur : Thomas Archibald (T. A.) BARRON est un auteur de romans de fantasy pour enfants et jeunes adultes et de livres sur la nature. Il a étudié l'histoire à l'Université de Princeton, où il siège actuellement au conseil d'administration. Il est diplômé en droit des affaires à l'Université de Harvard et vit dans le Colorado.

Sites de l’auteur (en anglais) : http://www.tabarron.com

22/07/2010

Quatre soeurs (M. FERDJOUKH)

Quatre soeurs.jpg« Parfois, Enid aurait aimé avoir moins de soeurs. »

Enid est la benjamine des sœurs Verdelaine. Elle a neuf ans, vit avec ses quatre sœurs dans la Vill’Hervé depuis que leurs parents sont décédés dans un accident de voiture et évolue dans un univers peuplé de TOCS  (dix-sept pas séparent la maison de l’arrêt d’autobus), de personnages aussi étranges  qu’une chauve-souris, un écureuil, un fantôme musicien ; elle parle aussi régulièrement à ses parents, qui ont la manie de surgir n’importe quand. A part ça, c’est une petite fille tout à fait normale, heureuse, malicieuse, peste à ses heures. Parce que la vie n’est pas facile quand on est la dernière…

Hortense quant à elle est l’avant-dernière des filles Verdelaine. Elle a onze ans, passe son temps à lire et à écrire son journal. Mais son rêve secret, c’est de devenir actrice. Heureusement, une rencontre inattendue avec Muguette en haut d’une falaise va décider de son destin…

Bettina, c’est la peste. Quatorze ans, la seule des cinq sœurs à avoir SA salle de bain, qu’elle occupe à longueur de temps (quand elle ne lit pas Futile ou qu’elle ne regarde pas le deux-centième épisode de Cooper Lane), elle ne se déplace jamais sans ses deux inséparables copines (Béhotéguy et Denise). Mais quand elle va rencontrer – enfin- l’amour, il ne ressemblera pas à ce qu’elle attendait…

Enfin l’été verra l’épanouissement de la plus effacée des sœurs, la plus dévouée et… la plus passionnée : Geneviève. Celle qui lave plus blanc que blanc, celle qui ressemble à Marilyn Monroe quand elle met des talons, celle qui pratique la boxe thaï en faisant croire qu’elle fait du baby sitting. Seize ans, un petit boulot de vendeuse de glace pour l’été et un premier grand amour au parfum du danger…

Difficile de résumer l’esprit qui règne dans ce roman : tour à tour profondément ancré dans le quotidien et subitement filant vers la fantaisie la plus débridée. L’univers est celui de tout le monde : c’est celui de l’enfance, de cette époque où l’on se régalait des aventures du Club des Cinq (et Enid sait à merveille, à l’instar de son illustre homonyme, nous entraîner dans des souterrains et des puits enfouis), où l’on chantait à tue tête devant Peau d’Âne préparant sa galette et regardant sortir le poussin de l’œuf cassé, mais c’est aussi celui du chagrin et de la perte (les cinq sœurs Verdelaine ont perdu deux ans plus tôt leurs parents dans un accident d’automobile).

Les noms sont improbables, les situations cocasses, Malika FERDJOUKH semble avoir un sérieux penchant pour les bras-cassés, les fêlés qui, comme le dit si bien Anna Gavalda, « laissent passer la lumière » et l’on ressort de cette lecture avec un large sourire aux lèvres et l’envie d’ouvrir sa porte pour laisser entrer le soleil.

- Est-ce que je peux dire encore un truc ? réclama Enid. La deuxième chose que je préfère, c’est quand je dis que je m’appelle Julia.

Charlie parut scandalisée.

- Tu as honte de ton prénom ? celui que ta mère et ton père t’ont choisi pour la vie ?

- La vie, c’est long.

- Vous savez bien que c’est le hasard s’ils m’ont appelé Enid.

C’était vrai. Dans la chambre de la clinique où Mme Verdelaine exhibait fièrement son nourrisson anonyme, M. Verdelaine énumérait le dix millième prénom du Dico des Prénoms. Aucun ne leur plaisait. Lucie Verdelaine avait alors formulé une espèce de vœu :

- Le premier prénom de fille qui sera prononcé dans cette chambre sera celui de ce bébé sans nom.

Il s’écoula quelques heures et quelques visites durant lesquelles Lucie et Fred épièrent phrases et paroles. Elle avait eu quelques sueurs froides lorsqu’on lui apporta le dernier best-seller de Myrtille trouvé. Mais le prénom ne fut pas prononcé.

Arriva le moment où Charlie, qui passait voir sa mère en sortant du lycée, alluma la télé à la seconde où un homme braillait sur l’écran : « j’en parlerai à Enid, ma femme. » Il s’agissait d’un film avec Jerry Lewis et Dean Martin. Lucie avait regardé Fred. Et vice-versa. En chœur ils avaient lancé :

Charlie, voici ta sœur Enid !

Charlie n’avait pas été étonnée outre-mesure. Elle-même devait son prénom à l’héroïne de L’ombre d’un doute. La boucle se bouclait.

Malika FERDJOUKH, Quatre sœurs.

Médium – Ecole des loisirs

608 pages – 19,50 €

Paru en 2010

NB : quatre romans portant chacun le nom d’une des sœurs ont été publié en 2003 et sont désormais réunis en un seul.

L’auteur : Malika Ferdjoukh est née à Bougie, en Algérie, en 1957. Elle vit à Paris et a travaillé dans un hôpital d'enfants avant de se lancer dans l'écriture. Elle écrit des romans pour la jeunesse, ainsi que des scénarios pour la télévision.

Un autre extrait : le mille-feuilles de petits-beurre aux spéculoos

18/05/2010

La Douane volante (F. PLACE)

La douane volante.jpg« La Bretagne, c'est ce grand bout de granit qui termine la France, à l'extrême pointe du continent : Finis Terrae, disent les savants.  »

En 1914, Gwen a quatorze ans. Ne sachant que faire de cet adolescent maladif et souffreteux, sa mère le place chez le vieux Braz, un rebouteux, qui va lui transmettre son savoir. Mais le vieux Braz va mourir et bientôt, la charrette noire de l'Ankou viendra chercher Gwen pour l'emmener dans un étrange pays, où règne la Douane volante, où la langue est ancienne, où Gwen l'Egaré va se révéler un guérisseur recherché.

Étrange roman que celui de François PLACE. Initiatique, onirique, inquiétant, le récit est tout à la fois. A la suite de Gwen, narrateur de son histoire, nous pénétrons dans un monde qui n'est ni tout à fait le même, ni tout à fait différent du nôtre, où les passions sont toutes aussi violentes mais où les frontières semblent anéanties. C'est un monde dont on ne sort pas. Mais d'ailleurs, comment y est-on entré ?

La mer est omniprésente, s'immisçant jusque dans les canaux de ses villes que l'on devine du Nord, la déliquescence aussi, les vapeurs d'alcool, il est très difficile de se repérer dans cet ouvrage unique : car derrière  cet univers trouble comme à travers une vitre de verre dépoli, on devine notre monde bouleversé, celui de la Grande Guerre de 14-18 et ses « jardins de fer », « comme si l'étoffe du temps pouvait se déchirer ».

François PLACE dit avoir voulu retrouver l' « atmosphère hollandaise du XVIIe : une terre plate, un monde rural » : il a placé son héros au cœur d'une toile où il le regarde apprendre à s'en désengluer. Est-on dans le rêve, dans la réalité ? Lui-même affirme avoir voulu « retrouver des visions du monde qui ne [soient] pas seulement rationnelles ». Son roman peut déranger le lecteur de quinze ans et plus dans ses repères traditionnels, mais il mérite cependant que l'on s'y plonge.

On allait cueillir des plantes avant l'aube. Il appelait ça les « simples », et moi je trouvais ça compliqué. Il en prenait une dans ses grandes mains noueuses, il la nommait de sa voix caverneuse, il frottait une feuille, la portait à son nez, et m'enjoignait de retenir son odeur. Il m'obligeait à distinguer chaque partie, à compter les pétales ou les lobes, à en goûter la sève. Il me faisait déterrer des racines, les nuits de pleine lune, qu'il fallait faire bouillir, ou bien réduire en poudre. On faisait aussi des choses un peu moins propres, avec des vers, des larves de ceci ou de cela qui se tortillaient sur du gros sel avant de finir broyées dans un mortier. Lui, rien ne le dégoûtait, sauf la connerie des hommes, selon ses propres mots.

François  PLACE, La Douane volante.

Gallimard Jeunesse

334 pages - 13,50€

Paru en 2009

L'auteur : François Place, né en 1957, a étudié à l'école des arts et industries graphiques Estienne à Paris, avant de travailler comme illustrateur, d'abord pour la publicité, puis pour l'édition jeunesse. En 1992, il passe à l'écriture de fiction avec un premier album remarqué «Les derniers géants», couronné par de nombreux prix. Son atlas imaginaire, «L'Atlas des géographes d'Orbæ», qui explore ving-six pays cartographiés comme des lettres de l'alphabet, est paru en trois tomes, entre 1996 et 2000. Il a reçu également plusieurs prix, dont un à la foire internationale de Bologne et un prix spécial «sorcières» décerné par les libraires jeunesse. Son dernier album, «La fille des batailles», a reçu le baobab du salon du livre de Montreuil. Ses albums parlent de l'ailleurs, des voyages, de la rencontre. Comme illustrateur, il a collaboré avec des auteurs comme Michael Morpurgo, Erik Lhomme, Timothée de Fombelle. Il a également travaillé pour le site internet jeunesse du musée du Louvre. En janvier 2010 est paru son premier roman «La Douane volante».