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21/07/2012

Les Poisons de Versailles (G. RESPLANDY-TAÏ)

« Un halo glacé enveloppe la petite troupe qui s’achemine à travers le parc, et les visiteurs qui s’approchent, soudés en un seul bloc pour mieux se protéger des morsures de la bise, ressemblent à des pantins maladroits à la démarche titubante. »

Nous sommes à Versailles, en 1672. Sur le chantier de son futur palais, Louis XIV est indifférent au sort des ouvriers qui se tuent à la tâche, comme à celui d’un jeune jardinier retrouvé assassiné dans le potager de La Quintinie. Pourtant, le poison rôde à la Cour du roi de France et nul ne sait de qui viendra le châtiment,  de La Montespan, experte en drogues en tout genre ou plutôt des Catalans révoltés contre l’insupportable gabelle, et que le roi a brisés et humiliés. Car un ruban à leurs couleurs, sang et or, a été retrouvé entre les doigts de la victime… Parmi tous ces illustres personnages, Vauban, Molière, Agnès, la jeune suivante de la reine, cache son passé : n’est-elle pas la seule rescapée de ce massacre qui impliquait des dragons du roi ? Et que penser d’une mystérieuse herbe, recherchée par le roi pour apaiser ses fièvres ?

Un peu complexe à première vue, Les Poisons de Versailles se révèle très vite un passionnant roman policier qui sait habilement utiliser la trame historique (et la parfaite connaissance qu’a l’auteur de cette époque) pour rendre vivante une période historique souvent figée dans le faste de l’absolutisme. Ici, Louis XIV se révèle un souverain encore jeune (il a trente-quatre ans), empêtré dans ses soucis domestiques, des problèmes de santé et un territoire qui est encore en train de se structurer. Ajoutons à cela son amour des arts et sa curiosité botanique, et vous aurez une bonne idée de souverain décrit dans le roman.

En parallèle se dessine la narratrice de cette histoire, Agnès Sola-Massuch, jeune catalane qui a vu l’assassinat de toute sa famille, excepté son frère Esteban, et qui ne cesse de redouter la vengeance de ce dernier, de retour en France. Son amitié avec Suzon, une domestique de Madame de Montespan, permet d’offrir en miroir aux fastes versaillais la condition du petit peuple à la même époque. Sa voix sait prendre ses distances avec les faits et les gens et favorise l’immersion du lecteur dans cette histoire confuse mais dont les fils se démêleront peu à peu.

Guillemette RESPLANDY-TAÏ a su jouer avec beaucoup de brio de ce point de vue interne et offre une fin de roman particulièrement intéressante. De surcroît, Les Poisons de Versailles permettent de côtoyer un Molière affaibli par la maladie mais créant son ultime pièce, un La Quintinie, jardinier en chef qui n’a de cesse de réussir des miracles, ce qui en fait une délicieuse lecture, érudite mais jamais pédante.

 J’ai été bien éduquée, mon père était un riche éleveur qui avait eu les moyens, et surtout l’intelligence, de me laisser profiter des leçons données à mon frère Esteban par un précepteur venu de Camprodon. Je sais ainsi lire et écrire, parler en catalan, en castillan et même en français malgré un terrible accent qui me faisait rouler les « rrr » et dont je n’arrivais pas à me débarrasser jusqu’à mon arrivée à la Cour mais que je sais aujourd’hui parfaitement dissimuler, tant les moqueries et agaceries de mes camarades à ce propos m’ont fait souffrir.

Ce sont mes talents de guérisseuse que la reine recherche. Aurait-elle peur ? De qui, je ne le sais pas encore, mais le poison rode à la Cour du roi de  France.

Guillemette RESPLANDY-TAÏ, Les Poisons de Versailles

Gulf Stream

215 pages – 12,50€

Paru en 2011

L’auteur : Docteur en pharmacie, Guillemette RESPLANDY-TAÏ est passionnée par la botanique dont elle fait l’un de ses thèmes favoris pour ses romans jeunesse, en particulier la série des « Thomas L’Aristoloche » aux éditions Le Pommier. Elle est également l’auteur de nouvelles et de récits historiques aux éditions Montalant et Nouveau Monde. Elle a choisi de réunir ses deux passions pour Les Poisons de Versailles.