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09/05/2012

Un soldat allemand dans la Résistance française (G. STREIFF)

« Le premier-maître Hans Heisel finit de se rhabiller ; il époussette d’un geste rapide ses bottes, se redresse, s’étire, enfile sa veste bleu sombre, celle des sous-officiers de la Kriegsmarine, la marine de guerre nazie. »

Lorsqu’à dix-huit ans, au début de la guerre, Hans Heisel a été incorporé dans la Wehrmacht et affecté à Paris, il jubile. Lui, le jeune provincial d’origine modeste, le voici dans la Ville Lumière. Nazi ou anti-nazi, il ne sait pas trop : il est allemand, son pays est en guerre, il fait donc la guerre. Pourtant, peu à peu, il va prendre conscience de certaines choses. Et une amitié avec un coiffeur alsacien va précipiter les choses…

Un soldat allemand dans la Résistance française est d’abord une histoire vraie : celle d’Hans Heisel, sous-officier allemand et membre de la Résistance. Une histoire peu connue que celle de ces soldats allemands qui ont choisi de désobéir et de se rallier à la cause française. Pourtant, un dossier à la fin de l’ouvrage l’explique, ils seraient plus de cent à avoir péri dans les rangs de la Résistance entre 1941 et 1944.

En quelques cents pages, Gérard STREIFF raconte l’itinéraire de Hans Heisel, et à sa suite de Kurt Hälker et Arthur Eberhard, depuis le soldat respectueux jusqu’au Résistant français. Il raconte la duplicité, la peur de se faire prendre, la distribution de tracts dans les endroits fréquentés par les nazis, les vols d’armes… Sans jamais être dans le sentimental ou le militant, l’auteur pose simplement la question de savoir, « face à un ordre injuste, une loi injuste, une institution injuste, on a le droit de s’opposer ? »

Un soldat allemand dans la Résistance française est sous-titré « Le Courage de désobéir » : il rend hommage à ces hommes qui ont fait passé leur idée de la liberté avant leur vie propre. Et qui n’en ont pas été remercié puisque lors du cinquantième anniversaire de la libération de Paris, en 1994, on lui a refusé de participer à cette manifestation au motif qu’il était « traître à l’armée allemande »selon le chancelier Kohl…

-       Je ne suis qu’un soldat, un rouage de la machine, je suis aux ordres, je n’ai rien demandé. Mais objectivement, je me sens complice d’un immense crime, je suis complice, tu comprends ce que je veux dire ? Cette guerre ressemble à un crime organisé par le régime nazi et moi j’y tiens ma place. Même s’il faut bien obéir, non ?

Il se tait, il espère peut-être un encouragement de l’artisan qui pourtant ne dit rien. Heisel reprend, la voix légèrement enrouée :

- Je ne veux pas jouer ce rôle, tu entends. Je ne veux plus ! Je ne sais pas comment te le dire mais je te le dis tout de même : il faut faire quelque chose. Il faut que je fasse quelque chose. Mais quoi ?

Gérard STREIFF, Un soldat allemand dans la Résistance française.

 Oskar - Histoire

125 pages – 9,95€

Paru en 2011

L’auteur : Gérard STREIFF est né en 1949 à Moyeuvre en Moselle et vit à Ivry dans le Val-de-Marne. Diplômé en Sciences Politiques, il est journaliste d’investigation, essayiste et romancier français. Il écrit surtout des romans policier et des biographies. Avec des romans engagés, documentés, et souvent en prise directe avec l’histoire, l’œuvre de Gérard STREIFF se situe dans la lignée de Didier DAENINCKX et Pierre BOURGEADE, deux auteurs qu’il vénère.

Site de l'auteur : http://www.gerardstreiff.fr

11/01/2012

L'Etang aux libellules (E. IBBOTSON)

« - Pleurer à ton âge ! s’exclama Tante Hester d’un ton de reproche. Tout de même, à cinquante-deux ans, on ne pleure pas. »

Londres, 1939. La jeune Tally, onze ans, a obtenu une bourse pour intégrer une école dans le Devon. D’abord paniquée à l’idée de quitter son père et ses tantes aimantes, elle va découvrir Delderton, un établissement plutôt progressiste pour son temps qui vise en premier lieu l'épanouissement des élèves. A l’occasion d’un voyage d'échange scolaire avec le petit pays de Berganie, en Europe centrale, l’Histoire va soudain s’accélérer : le roi qui s'oppose à Hitler est assassiné. Son fils est en danger. Menés par Tally, tous vont s’unir pour lui permettre de quitter le continent.

Uchronie sur le principe (un état imaginaire, une situation qui pourrait être), cet Étang aux libellules est un très beau roman humaniste et optimiste, qui évoque la question de la résistance face à l’oppression : c’est parce qu’elle a vu un reportage sur la Berganie, petit pays qui refuse de plier face à Hitler, quand tous les grands d’Europe l’ont fait que Tally a voulu que son école participe au festival organisé là-bas, malgré les dangers encourus. L’attitude des enfants tout au long du livre s’oppose à celle des adultes, faite de concessions, de renoncements et de rigidité au nom d’une tradition qui n’a plus lieu d’être.

On ne peut qu’être touchés par chacun des personnages, depuis ceux des enfants, bien sûr, que ce soit la petite fille de célébrité abandonnée dans son pensionnat au jeune garçon qui aurait voulu « être dans une école normale » et jouer au cricket, jusqu’aux adultes, avec notamment le mystérieux Matteo. Quant à Tally et Karil, ils révèlent chacun à leur manière une maturité impressionnante et pourraient en remontrer à bien des adultes.

L’Etang aux libellules est un récit initiatique, la chronique d’une résistance et la conquête d’une liberté, à la fois individuelle et collective.

- Je ne veux critiquer personne, mais qu’est-ce que cette école exactement ? On parle d’une école progressiste, et je connais le sens du mot progresser – du moins, je pense. Ça veut dire aller d’un endroit à l’autre. Mais où ?

- Ah, c’est une bonne question, répondit le directeur, l’air soudain pensif. Eh bien, nous voulons que les enfants prennent leur vie en main. Qu’ils choisissent ce qui est bon pour eux plutôt qu’on le leur impose.

- Oui, je vois. Mais pour ça, il faut savoir ce qui est bon.

- Et tu ne crois pas que chacun le sait ?

- Si, en général. Mais est-ce que… l’école dans son ensemble ne devrait pas aller d’un endroit à un autre ? Vers un endroit meilleur… puisqu’elle est progressiste ? Enfin, le monde n’est pas très bon, n’est-ce pas, avec la guerre qui arrive et tout ça ?

Daley resta silencieux. L’enfant avait certainement raison en ce qui concernait l’état du monde. Pendant un instant, il vit ce qu’elle voyait : toute l’école s’avançant comme une armée vengeresse du côté du Bien.

Eva IBBOTSON, L’Etang aux libellules.

Nathan

460 pages – 17€

Titre original : The Dragonfly Pool  – Paru en 2008– Traduit en Français en 2011

L’auteur : Née à Vienne en 1925, Eva IBBOTSON a vécu en Angleterre, où elle a rencontré un très grand succès. Elle est célèbre pour ses romans jeunesse, notamment Reine du fleuve et L’Étoile de Kazan, publiés en France. Avec L’Étang aux libellules, elle a remporté le School Library Journal Best Book of the Year 2008. Récemment disparue – en octobre 2010 –, Eva IBBOTSON a reçu un hommage unanime de l’ensemble de la presse anglaise.

06/10/2010

Tout doit disparaître (M. OLLIVIER)

images.jpg« J’aurais aimé avoir le sens de la répartie. Dire ce qu’il faut sans hésiter, trouver les mots sans bafouiller, au moment précis où j’en ai besoin. »

Hugo a onze ans lorsque ses parents, enseignants, quittent le nord de la France pour aller enseigner à Mayotte. Il va ainsi découvrir une nouvelle société, un nouveau monde, de nouvelles personnes, mais aussi apprendre la différence, l’injustice et les inégalités. Le retour en France, trois ans plus tard, sera très difficile…

Roman scindé en deux, Tout doit disparaître propose une vision extrêmement bien documentée de ces « expats », ces Français de métropole qui, moyennant salaires amplifiés et avantages fiscaux, partent enseigner outre-mer. Le récit de Mikaël OLLIVIER dépeint avec beaucoup de réalisme cette micro-société qui vit en cercle fermé, joue les vieux briscards auprès des nouveaux après un an de présence sur l’île et ne peut s’empêcher de porter sur les « indigènes » un regard suffisant quoiqu’empreint de pitié sur ces gens « décidément pas comme nous »…

L’intérêt de la narration est de présenter les choses du point de vue de l’adolescent, qui observe en spectateur ces comportements mais finit par s’impliquer, plus que ses parents ne l’auraient voulu. Mayotte va devenir pour lui le catalyseur de sa révolte adolescente, où il rejettera en bloc la société consumériste et les comportements de ses semblables.

Court roman de cent cinquante pages, Tout doit disparaître se lit très facilement, car il est accessible à de multiples plans : roman des amours adolescentes, critique sociale, réflexion sur nos valeurs, il saura toucher tous les publics à partir de treize ans.

A mon retour, en plein hiver, j’ai eu autant de mal à me réadapter à la vie métropolitaine que j’en avais eu à trouver ma place dans la société mahoraise. Les premiers temps, j’avais l’inconfortable sensation de ne plus être nulle part. (…)

Au collège, je n’avais pas envie de me faire de nouveaux amis. Je me sentais étonnamment mal à l’aise avec les jeunes de mon âge. Aucun d’entre eux ne me rejetait ni ne me tenait à l’écart, c’était moi qui refusais de jouer le jeu. Car il s’agit bien d’un jeu, non ? Ces conversations enflammées sur des sujets sans importance, ces blagues et expressions à la mode, ces magazines qu’il faut absolument lire, ces programmes télé qu’il faut avoir vus… Tout me semblait ridicule, mais en même temps, je souffrais de ne pas en être, de ne pas parvenir à redevenir un adolescent ordinaire, de ne plus savoir apprécier ou me contenter de la vie de mes semblables. (…) trop immature pour Mayotte, trop mûr pour Béthune ? Je flottais entre deux eaux : ni triste, ni gai, ni en colère, ni résigné. Flottant. A côté de moi-même et des autres.

Mikaël OLLIVIER, Tout doit disparaître.

Thierry Magnier

157 pages – 8,50€

Paru en 2007

L’auteur : C’est à l’âge quinze ans, dans la salle obscure de son ciné-club favori, que tout se joue pour Mikaël Ollivier. C’est la fin d’un cycle Alfred Hitchcock, et quand les lumières se rallument après la projection du dernier film, il se dit que c’est ça qu’il veut faire plus tard. Ça quoi ? Il n’en sait rien encore. D’abord cinéphile passionné, il devient un lecteur boulimique et, à vingt-cinq ans, décide d’arrêter son travail d’assistant de production à la télévision pour se lancer dans l’écriture.

Romans pour la jeunesse et pour les adultes, nouvelles, scénarios pour la télévision et le cinéma, polars, récits intimistes ou futuristes : plus qu’écrivain, Mikaël Ollivier se sent « raconteur d’histoires ». Plusieurs de ses romans ont été adaptés à la télévision et au cinéma. Directeur d’une collection de nouvelles pour les adolescents aux éditions Thierry Magnier, il vit aujourd’hui en Eure-et-Loire.

 

Site internet : http://www.mikaelollivier.com