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07/01/2015

#BLEUE (F. HINCKEL)

« T’es de quel signe, toi, Silas ? »

IMG_1782.JPGDepuis la création de la Cellule d’Éradication de la Douleur Émotionnelle (CEDE), la souffrance psychologique n’a plus cours. Il suffit de se faire oblitérer, et on ressort comme neuf ; seul un point bleu à l’intérieur du poignet garde la trace de cette douleur effacée. L’intervention est obligatoire pour les mineurs. Les adultes, eux, ont le choix. Le jour où sa petite amie Astrid se fait renverser par une voiture, le jeune Silas est aussitôt emmené par les agents en combinaison jaune. Le lendemain, lorsque ses parents viennent le chercher, le garçon se sent bien. Tout n’est-il pas pour le mieux dans le meilleur des mondes ?

Roman de science-fiction (quoique…), #BLEUE raconte à deux voix l’histoire de deux adolescents, Silas et Astrid, amoureux dans une société où tout est réglé par « le Réseau », de son lever à son coucher, où toute souffrance est bannie, si facile à suppléer par une sensation cotonneuse, celle de « l’oblitération ». Seuls restent quelques résistants, qui refusent cette oblitération car cela signifie la fin des douleurs, certes, mais aussi celle des souvenirs.

#BLEUE raconte l’itinéraire croisé de deux adolescents qui vont reconquérir leur indépendance et leur autonomie, non ans payer un certain prix.

Profond, efficace, réfléchi et surtout profondément humain, le roman de Florence HONCKEL est passionnant !

Il paraît qu'avant, la rue était beaucoup moins sûre. Mais aujourd'hui, l'oblitération est entièrement prise en charge par l'État, ce qui fait qu'un gars comme ce SDF peut en bénéficier autant qu'il le souhaite. Bien entendu, il sera toujours sensible au dénuement, à la sensation de froid ou de faim, mais il peut oublier la douleur morale qui en découle. Ainsi, tous ceux qui ne souffrent plus de leurs conditions de miséreux n’ont plus aucune raison d'être agressifs. Après tout, il faut bien qu'il y ait des pauvres, des moins pauvres et des riches dans notre société ! C'est comme ça depuis toujours, et puisqu'il n'y a pas de travail pour tout le monde, à quoi bon en souffrir ? Quoi avoir pitié de ? Chacun peut être heureux à sa place dans la société car celle-ci a besoin de diversité.

Les pires criminels passent même en CEDE de façon obligatoire. On leur fait oublier la douleur originelle qui les a conduit sur le mauvais chemin. Cette expérience nous a d’ailleurs fourni la preuve que l'homme est naturellement bon, comme quelques philosophes anciens le supposaient. On sait désormais de façon certaine que seuls les aléas de la vie ne rendent certains individus mauvais. En oubliant ce qui les hante, ils redeviennent doux comme des agneaux. Ainsi, l’insécurité a beaucoup diminué. J'estime que j'ai beaucoup de chance de venir avec ce progrès.

Florence HINCKEL, #BLEUE

Syros - Soon

 Paru en 2015 - 288 pages – 15,90 €

Paru en 2012 en poche – 6,90 €

 

L’auteur : Florence HINCKEL est née en 1973, dans le nord-est de la France, dans la région des hauts fourneaux. Pour cause de fermeture d'usine, ses parents ont choisi de déménager en Provence quand elle avait 3 ans, pour y trouver du travail... et du soleil. Toute petite, elle rêvait d'être écrivain, ou bien ingénieur en aéronautique. Elle a écrit son premier roman à 11 ans. C'était un roman d'aventures, qui menait ses héros en plein cœur de la forêt amazonienne. Elle adorait aussi les mathématiques et les nouvelles technologies. Ses goûts éclectiques lui ont posé de sérieux problèmes d'orientation ! Elle a choisi de suivre des études d'informatique, mais elle est finalement devenue professeure des écoles. Elle a enseigné principalement à Marseille, mais aussi en Guadeloupe et en Guyane. Après la naissance de sa fille, elle a renoué avec l'écriture, et a publié son premier roman pour enfants, un polar, en 2003. Depuis, elle a eu un petit garçon, et a écrit de nombreux romans jeunesse (dont L’été où je suis né, en 2011, dans la collection « Scripto » chez Gallimard). Aujourd'hui, elle écrit à plein temps.

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30/12/2012

Théa pour l'éternité (F. HINCKEL)

« Je n’avais pas encore seize ans. »

Théa est secrètement amoureuse de Théo, son voisin et meilleur ami d’enfance, qui lui préfère la pom-pom girl du lycée. Elle vit seule avec sa mère, une ancienne présentatrice de télévision obnubilée par le souci de paraître jeune, et elle a l’impression que le temps passe trop vite et que les promesses de l’enfance sont déjà loin. Alors, quand le professeur Jones lui propose d’être le plus jeune cobaye d'un programme visant à stopper le vieillissement, Théa se dit que c’est une chance unique qui s’offre à elle...

A travers son roman, Florence HINCKEL aborde la question au centre de notre société : l’apparence. Paradoxalement, dans un monde où  l’on veut le plus rapidement être autorisé à tout, à aller toujours plus vite, on veut aussi arrêter le temps, le figer, et que tout soit aussi beau que dans l’enfance.

Car il y a de l’Antigone chez Théa, ce « je veux tout, tout de suite, et que ce soit entier, ou alors je refuse ». Elle veut que le temps s’arrête à ses seize ans, même si elle n’a pas encore eu le temps d’apprécier cette « fleur » de l’âge et qu’elle est déjà dans le regret de l’enfance dont elle n’est pas sortie, dans cette relation fusionnelle avec sa mère qui va malgré elle l’entraîner vers l’opération fatidique.

Narratrice de sa propre histoire, Théa nous détaille ses actions et ses comportements, davantage que ses pensées qu’elle esquisse plus qu’elle ne les dépeint, et c’est ce qui lui donne une certaine superficialité, malgré la profondeur du sujet.

- Et si ton père avait raison ? Et si nous étions plus nombreux que tu ne le crois penser comme ton père ?

J'en fus estomaqué. Je mis plusieurs secondes, peut-être une minute entière, avant d'oser lui demander :

– Tu veux dire que… que toi tu choisirais de ne pas prendre le traitement ?

– Bien sûr, Théa ! Bien sûr que je refuserais de prendre cette saloperie ! Qu’est-ce que tu crois ? Qu’est-ce qui donne de la beauté aux choses ? C’est le fait qu’elles changent et qu’elles meurent, Théa, c’est parce qu’elles meurent qu’elles sont belles ! Pourquoi tu crois que je fais de la photo ? Pour saisir des instants qui ne reviendront jamais, et c’est ce que j’aime. Fixer ces choses-là, furtives, mais les fixer sur une image, pas en vrai. Sinon, quel intérêt ?

Florence HINCKEL, Théa pour l’éternité

Syros - Soon

224 pages – 15,50 €

Paru en 2012

L’auteur : Florence HINCKEL est née en 1973, dans le nord-est de la France, dans la région des hauts fourneaux. Pour cause de fermeture d'usine, ses parents ont choisi de déménager en Provence quand elle avait trois ans, pour y trouver du travail... et du soleil. Toute petite, elle rêvait d'être écrivain, ou bien ingénieur en aéronautique. Elle a écrit son premier roman à onze ans. C'était un roman d'aventures, qui menait ses héros en plein cœur de la forêt amazonienne. Elle adorait aussi les mathématiques et les nouvelles technologies. Ses goûts éclectiques lui ont posé de sérieux problèmes d'orientation ! Elle a choisi de suivre des études d'informatique, mais elle est finalement devenue professeure des écoles. Elle a enseigné principalement à Marseille, mais aussi en Guadeloupe et en Guyane. Après la naissance de sa fille, elle a renoué avec l'écriture, et a publié son premier roman pour enfants, un polar, en 2003. Depuis, elle a eu un petit garçon, et a écrit de nombreux romans jeunesse (dont L’été où je suis né, en 2011, dans la collection « Scripto » chez Gallimard). Aujourd'hui, elle écrit à plein temps.

Blog de l’auteur : http://florencehinckel.com

10/07/2011

La Fille de mes rêves (C. LAMBERT - S. VANSTEEN)

« Pierre Morel – ou plutôt Sangoku-l’aventurier – a le cœur qui bat. »

Afin d’aider sa mère qui les élève seule, sa petite sœur et lui, dans leur HLM de banlieue, Kamel, lycéen banal, est veilleur de nuit dans une entreprise de haute technologie. Cette dernière commercialise Real Dream, un espace virtuel de rencontres auquel on accède par le rêve, grâce à un avatar. Ainsi, il va pouvoir entrer en contact avec sa nouvelle et sculpturale professeur de Français. Mais le problème, c’est que les choses vont se compliquer…

Roman tonique, au suspense haletant, à la fois drôle et profond, le roman à quatre mains de Christophe LAMBERT et Sam VANSTEEN est une vraie réussite. C’est davantage dans un univers fantastique que l’on pénètre avec cette Fille de mes rêves, en ce sens qu’on entre dans une réalité proche de la nôtre, très proche, mais où l’on a basculé dans un univers où l’argent et le virtuel sont partout. Les établissements scolaires sont gérés par de grands groupes privés (le collège s’appelle Francis Bouygues, le lycée Lagardère…) et l’on se réfugie dans le virtuel pour y rêver tranquille, parce « le réel, c’est la porte ouverte aux déceptions, aux visages cernés par une mauvaise nuit, sans compter les soucis et les contingences bassement matérielles ». Pour autant, on continue à rouler en scooter, même si on recourt plus souvent aux gélules alimentaires qu’à la cuisine mijotée…

La narration joue sur plusieurs niveaux, tantôt à la troisième personne pour raconter la trame de l’histoire, tantôt à travers la voix de Kamel pour apporter un contrepoint à la fois lucide et rafraîchissant sur cette société miroir de la nôtre. L’écriture est dynamique, les chapitres courts, et l’on suit sans difficulté les aventures des multiples personnages. L’intrigue policière apporte un surcroît d’intérêt à l’ensemble et fait de La Fille de mes rêves un roman que l’on dévore d’une traite, qui plaira à tous, filles et garçons.

L’unité Watchmen est un service ultra secret. Ses membres, les « veilleurs », ont pour mission de contrôler les rêves des abonnés. Ils travaillent dans une salle bardée d’écran. Chaque songe s’apparente à un programme télé, une chaîne différente. Les techniciens zappent sans relâche. Au moment de la mise en place de Watchmen, il s’agissait de répertorier et d’analyser les habitudes des consommateurs, leurs fantasmes, leurs déviances, pour mieux anticiper la demande et proposer un éventail de décors oniriques toujours plus attractifs. Puis, au fil des semaines, des incidents se sont multipliés. On peut les ranger en deux grandes catégories. Les incidents de type comportemental, tout d’abord. De temps en temps des gens – surtout des hommes – vont un peu trop loin. Un viol virtuel n’est pas un viol, mais quand même… Des clientes traumatisées, voilà une publicité dont la société tient à se dispenser. Quand une telle alerte se déclenche, les veilleurs doivent analyser la situation en quelques secondes et interrompre le rêve avant que l’irréparable ne soit commis. Un simple bouton et « clic », c’est fini.

Christophe LAMBERT-Sam VANSTEEN, La Fille de mes rêves.

Soon - Syros

330 pages – 15,90€

Paru en 2011

Feuilleter un extrait : http://www.syros.fr/feuilletage/viewer.php?isbn=9782748509854

Les auteurs :

Sam VANSTEEN : « Mon rêve, ce serait d’être écrivain »
« Et bien écris » m’a répondu tout naturellement un ami. C’était il y a dix-huit ans. Sous cette impulsion, j’ai donc rédigé mon premier roman. Un thriller policier. Resté depuis dans un carton. Mais après quelques années de persévérance Le Méli Mélo d’Alma et Léo est né aux éditions les Portes du Monde (2003), suivi par Le Guide des Tribus (2005, même éditeur) et par Le Courrier de Lollytop (Hachette jeunesse, 2005) version papier de la chronique que j’animais alors pour Canal j.
Car entre temps je m’étais faite littéralement happer par le monde de la jeunesse et celui de la télévision. Dix ans à Canal j en tant que journaliste et chroniqueuse, puis ensuite journaliste, présentatrice et réalisatrice d’émissions spéciales – notamment jeunesse – pour Equidia, la chaîne du cheval. D’où Acrobate, un roman situé dans le monde équestre et Dino (éd. Manuscrit.com). Enfin c’est un retour vers des strates plus obscures, un roman policier pour adultes, Mémoire Vive, qui a conduit Christophe Lambert à me contacter pour co-écrire avec lui La Fille de mes Rêves afin que je me consacre à la partie enquête.
Écrivain et comédienne, mon autre métier, je suis maintenant installée à San Francisco avec mon mari et ma fille Amy, 4 ans.

Christophe LAMBERT (non, pas l’acteur !) est né en 1969 en région parisienne. Il a suivi des études de cinéma, réalisé plusieurs courts-métrages, travaillé pour la télévision (M6) et dirigé des ateliers vidéo dans les collèges. Il vit actuellement de sa plume.
Dès son premier roman de science-fiction, La Nuit des mutants (1997), dont l’action a pour cadre un bagne orbital, il obtient le Prix Ozone. Depuis, il a publié une quarantaine de romans en littérature jeunesse, parmi lesquels un impressionnant roman-catastrophe, Titanic 2012 (1999), un roman historique sur la guerre de 14-18, L’Or et la boue (2002), Infaillible ! (2007), etc.
Son goût pour les romans d’anticipation sociale en a fait un pilier de la collection « Autres Mondes » chez Mango, avec des romans comme Clone connexion (2002), Petit Frère (2003) ou encore La Loi du plus beau (2004).
Il a récemment effectué une percée remarquée en littérature adulte avec Zoulou Kingdom (2007), Le Commando des Immortels (2008), Vegas Mytho (2010) et surtout La Brèche (2005), qui a remporté un beau succès, et en littérature pour young adults avec Le Dos au mur (2008).
La force de Christophe Lambert est d’intéresser tous les publics, les jeunes comme les moins jeunes, avec des romans à l’écriture cinématographique, dynamiques et intelligents.

10:42 Publié dans Science-fiction | Lien permanent | Tags : syros, soon, lambert, vansteen, adolescent, virtuel, rêve | |  Facebook | | |

08/06/2011

Le Signe de K1 - Le Temps des Tsahdiks (C. GRATIAS)

« Notre frère Yehuya s’est « effacé » à son tour ce matin. »

An 2322, les hommes s’effacent peu à peu, sans explication. Jusqu’à la vérité : les « pionniers » ont été manipulés. Envoyés sur Terre en 2020 pour préserver la survie des peuples futurs, ils découvrent que le virus envoyé propage la violence et que le président Tubal-K ne cherche qu’une chose : se protéger, lui et sa caste, et tuer « l’Ancêtre », à l’origine de la lignée des K2 et K3.

Curieux résumé, à la limite de l’incompréhensible ainsi dit, Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks est la suite de Le Signe de K1 – Le Protocole de Nod et la plupart des personnages du premier volume se retrouvent dans le second. Il est néanmoins tout à fait possible le second sans avoir pris connaissance du premier, chaque livre formant un tout et le second explicitant les développements du premier.

Claire GRATIAS a écrit un roman tout à fait passionnant, à la fois complexe et limpide. Complexe car sa construction est extrêmement subtile, jouant sur la chronologie, les allers-et-venues dans le temps, et ménageant à chaque chapitre ou presque un rebondissement inattendu. Et limpide cependant car la narration déroule son fil avec fluidité, les personnages sont extrêmement bien construits, avec beaucoup de finesse, et l’on s’attache à leur destin avec une angoisse mêlée d’espoir.

Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks ouvre une réflexion particulièrement intéressante sur notre société actuelle, ses dérives et ses limites. Roman de science-fiction, roman fantastique, avec ses voyages dans le temps et autres pouvoirs paranormaux, mais aussi roman de société, avec les thèmes de la manipulation politique des populations laissées dans l’ignorance par ses dirigeants, et roman d’amour enfin, Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks a tout pour plaire à différents publics.

- Mes jours sont désormais comptés, Menadel.

Le vieil homme ressentit une vive émotion. Cependant, pas un trait de son visage ne tressaillit.

- Que cherchaient-ils ? demanda-t-il calmement.

- Ils ont réussi à décoder l’iris de mes yeux, puis à partir de là, grâce à leurs connaissances extrêmement poussées en biométrie, ils sont remontés dix générations en arrière et ont reconstituer la signature iridienne de mon ancêtre. Celui qui vivait au XXIème  siècle…

- Vous voulez dire… l’Ancêtre ?

Oui. Grâce à son IrisCode, ils sont désormais en mesure de l’identifier. (…)

- Que comptez-vous faire, Commandeur ? demanda-t-il en rouvrant les paupières.

- Nous n’avons pas le choix : nous devons le trouver avant eux. Nous devons sauver l’Ancêtre.

Claire GRATIAS, Imago.

Soon - Syros

336 pages – 15,90€

Paru en 2011

Feuilleter un extrait : http://www.syros.fr/feuilletage/viewer.php?isbn=9782748510614

L’auteur : Née un an après "Les Tontons flingueurs", Claire GRATIAS ignorait alors que ce chef-d'œuvre deviendrait un jour son film culte. À cette époque, la télévision était en noir et blanc et ne proposait que deux chaînes. Restait la lecture. Elle s'y adonna avec ferveur. Sa deuxième grande passion était le cirque. C'est probablement ce qui la conduisit à rejoindre pour un temps le grand corps malade de l'Instruction Publique alors rebaptisée Nationale Éducation, où elle exerça durant quinze patientes années au cœur même de la cage aux fauves, sous les regards admiratifs de spectateurs frémissants d'angoisse et de compassion. Jusqu'au jour où elle se rappela cette sage maxime de l'oncle Fernand : « Quand la protection de l'enfance coïncide avec la crise du personnel, faut plus comprendre, faut prier… » Et elle s'enfuit nuitamment avec un trapéziste volant. Après un atterrissage forcé sur le toit d'une maison d'édition, elle décida de se reconvertir dans l'écriture (« Ah ! si c'est une œuvre… »). Depuis, elle rencontre régulièrement de gentils lionceaux gavés de télévision pour parler avec eux de livres noirs et blancs…

01/05/2011

Imago (N. LE GENDRE)

« - Dun, arrête-toi un peu, souffla Shin, les deux mains cramponnées sur son ventre tendu. »

Neï est une K’awil, un peuple premier qui vit retiré du monde  après un mystérieux cataclysme qui a décîmé une partie de la population terrestre. Elle s’apprête à passer son imago, le rite de passage des K’awils pour devenir adulte, quand elle est frappée par un drame : sa sœur et son mari ont été tués par un K’tioni, un tigre monstrueux aux dents de sabre, et c’est à elle que revient la charge de s’occuper de leur nouveau-né, une petite fille. Dans cette société clanique et matriarcale, c’est Néï qui doit devenir la chef du clan des armuriers et faire son éducation. Mais elle découvre bientôt que des T’surs, les hommes blancs, se sont introduits sur leur territoire, rompu le pacte établi des décennies plus tôt.

Imago est un roman touffu, étrange et passionnant. Evoluant dans un monde exotique et fabuleux, il raconte une histoire à la fois futuriste et archaïque. Curieux miroir de notre société actuelle, lui en offrant un reflet presque inversé à travers cette civilisation menée par les femmes, c’est également une réflexion sur notre planète et les raisons qu’ont les hommes de la détruire.

Nathalie LE GENDRE a construit des personnages forts, attachants et déterminés, qu’ils soient féminins ou masculins, et le lecteur, une fois familiarisé avec les noms et coutumes étranges a priori, les suit avec bonheur et les regarde évoluer en parfaite empathie.

Le style est précis, la narration nerveuse et dynamique, les descriptions éclairent à bon escient sans jamais ralentir le fil de l’histoire, tous ces éléments font d’Imago un excellent moment de lecture.

Les sept clans qui composaient le peuple K’awil possédaient chacun une spécialité, mais chaque membre devait être polyvalent, tout particulièrement les hommes qui évoluaient dans cette société matrilinéaire. Dès qu’ils s’unissaient, ils intégraient le clan de leur épouse et devaient donc s’adapter à n’importe quel foyer.

Neï trotta sur la corniche qui séparait les maisons troglodytiques du vide, puis descendit jusqu’à la petite cascade qui dévalait vers un arbre tordu dont les racines baignaient dans une piscine naturelle. Là, elle s’aspergea la nuque, se frotta les bras, les mains, les pieds – sa peau très mate luisait sous le soleil déjà puissant -, puis lissa ses cheveux vers l’arrière. Elle n’avait qu’une hâte : achever la dernière étape de l’Argynnis, le rite du papillon, qui lui permettrait d’entrer dans le monde des adultes, et ne plus avoir à enrouler sa chevelure sur sa tête en une savante coiffure. Cet ultime rite s’appelait l’imago.

Nathalie LE GENDRE, Imago.

Soon - Syros

246 pages – 14,90€

Paru en 2011

L’auteur : Nathalie LE GENDRE est l’auteur de plusieurs romans de science-fiction (Dans les larmes de Gaïa, Mosa Wosa…) récompensés par de nombreux prix littéraires. Elle a une relation toute particulière avec ses personnages et n’hésite pas à puiser directement dans son vécu pour rendre leurs émotions plus crédibles. Ses romans lui ressemblent : ils ont la liberté, la vie et l’humain comme moteur.

Site de l’auteur : http://www.nathalielegendre.fr

20:42 Publié dans Science-fiction | Lien permanent | Tags : syros, soon, le gendre, primitif, matriarcat | |  Facebook | | |