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27/06/2011

Soupçons (H. MESTRON)

« Ma mère a trouvé du travail en province. »

Adolescent à l’allure un peu décalée (il porte de très longs cheveux jusqu’en bas du dos et collectionne les vingt sur vingt), James vient de débarquer à Valence où sa mère a trouvé du travail. Une belle maison, un nouveau collège, tout irait pour le mieux s’il ne se sentait pas étrange. Bizarre. Différent. Et quand de surcroît des événements inexpliqués se produisent, il commence vraiment à douter de lui…

Raconté à la première personne, Soupçons est le récit mené par un adolescent qui découvre un nouvel endroit et essaie de s’y intégrer, sans toutefois vouloir se renier. Hervé MESTRON a su jouer assez habilement avec les frontières : les événements étranges qui semblent s’y dérouler sont presque flous, comme si le narrateur n’arrivait pas vraiment à y croire lui même.

Court récit de moins de cent pages, c’est d’ailleurs le principal reproche que l’on pourrait faire à ce roman : tout paraît s’y précipiter sans qu’on ait vraiment eu le temps de réagir et la fin « tombe » sur le même rythme, très vite. C’est cependant un roman qui pourra plaire à des lecteurs peu chevronnés, les autres risquent de rester sur leur faim.

Puis c’est comme partout ailleurs, les choses finissent par se caler, les personnalités cohabitent, la terre continue de tourner. Faut dire que je ne suis pas particulièrement sauvage. Moi j’aime le collège parce qu’il y a du monde, tout le temps, et toutes sortes de gens, des bouilles, des pifs, des bides, des ongles rongés et de bananes première fraîcheur. La pire des maladies, c’est d’être seul. Parce que c’est à travers les autres qu’on arrive le mieux à exister. Prenez un exemple : jaloux tout seul, ça n’existe pas. La jalousie, c’est toujours quelque chose qui vous relie à l’autre. Comme l’amour ou le ping pong.

Hervé MESTRON, Soupçons.

Tempo + - Syros

91 pages – 5,95€

Paru en 2011

L’auteur : Hervé MESTRON est né en 1963 à Valence. Lauréat du Conservatoire national supérieur de musique de Lyon, il devient très vite un auteur aux multiples facettes, passant indifféremment du polar à la comédie, de l’écriture de scénario au roman musicologique, de la fiction radiophonique à la littérature jeunesse. Certains de ses livres ont été traduits en plusieurs langues.

23/06/2011

Tout près, le bout du monde (M. LETHIELLEUX)

« Le plus difficile, c’est de commencer.»

Ils sont trois « bras cassés » de la vie qui débarquent un beau jour de novembre dans la ferme de Marlène, le bout du monde. Placés par l’institution, c’est une reconstruction par le travail qu’on leur propose : Marlène retape une vieille grange et ils doivent l’aider. Il y a Malo, le plus jeune, Julie et Solam. La règle est de chaque soir écrire une page, thérapie par l’écriture. C’est ainsi que va se dérouler le roman, à travers les trois voix qui d’abord déraillent avant peu à peu de se mettre à l’unisson.

La force du roman est d’abord sa construction tout en subtilité : en faisant le choix de laisser la parole à ses personnages, Maud LETHIELLEUX leur donne vie, leur donne voix, les rend tour à tour attendrissants, agaçants ou amusants. Loin de dire tout tout de suite, elle laisse le lecteur lentement cheminer à travers l’histoire de chacun, sans jamais juger ou influer. Le personnage de Marlène n’existant qu’à travers les témoignages des trois est notamment peu à peu dessiné, émergeant petit à petit, en filigrane du texte.

Une fois de plus, Maud LETHIELLEUX laisse parler sa tendresse envers les laissés-pour-compte, les marginaux, ceux que la société condamne sans prendre le temps de comprendre et, si certains passages peuvent horripiler, comme horripilent certaines personnes, d’autres savent aller droit au but et l’on referme le livre avec beaucoup d’émotion. Tout près, le bout du monde est une belle réussite.

Évidemment j’y ai pensé mais j’avais trop envie d’une vraie bouffe, avec du gras, tu vois, de la crème fraîche et des lardons, pas avec ton huile d’olive bio et tes oignons coupés gros comme ça. Comme je me suis pas gêné et comment t’as rien dit quand je t’ai dit de t’arrêter devant la supérette !

Après tous les ordres que tu nous as donnés pour tes putains de travaux, je me suis bien défoulé : épluche les châtaignes ! Y reste de la mousse sous le bolet !

N’empêche, t’as tout fait comme il faut. T’es plus docile que j’aurais pensé.

Au moins maintenant tu sais que même dans ta cuisine de Cro-Magnon on peut faire de la vraie bouffe. T’as entendu qu’on entendait rien pendant tout le repas ? T’as vu comment l’anorexique était plus anorexique ?

Maud LETHIELLEUX, Tout près, le bout du monde.

Éditions Flammarion - Tribal

510 pages – 10 €

                                    Paru en 2010

L’auteur : Maud LETHIELLEUD est musicienne et metteur en scène. Elle a parcouru le monde, de l’Asie à la Nouvelle-Zélande. Elle a publié Dis oui, Ninon chez Stock en 2009, puis D’où je suis, je vois la lune, son deuxième roman. Après J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait, Tout près, le bout du monde est son deuxième roman pour la jeunesse.

Site de l’auteur : http://maudetlesmots.free.fr

11/06/2011

Coeur cerise (C. CASSIDY)

« Il y a des choses qui vont me manquer, quand j’aurai quitté la Clyde Academy… comme les macaronis au fromage, les frites, le pudding au sirop et à la crème anglaise, ou contempler la nuque de Ryan Clegg en cours de dessin."

Depuis l’âge de quatre ans, Cherry vit seule avec son père à Glasgow, dans leur petit appartement. Mais voilà que tout va changer en cette fin d’année scolaire : Paddy a retrouvé une ancienne amie et lui et sa fille partent s’installer chez elle, dans le sud de l’Angleterre où elle possède une vaste bâtisse qu’elle a transformé en bed and breakfast. Là, Cherry va faire la connaissance de ses futures demi-sœurs, Coco, la benjamine, les jumelles Skye et Summer et surtout Honey, de quelques mois plus âgée qu’elle, qui n’a jamais accepté le divorce de ses parents et refuse de faire bonne figure aux nouveaux venus…

Cœur cerise est le premier volume d’une série, les Filles au chocolat, qui devrait en compter cinq. Dans celui-ci, on découvre la narratrice, Cherry Costello, adolescente rêveuse qui a tendance à se réfugier dans l’imaginaire pour pallier une réalité qui est loin de lui être favorable. Jamais intégrée dans aucun groupe, maladroite, un peu menteuse, elle va essayer de trouver sa place dans la nouvelle famille que son père et Charlotte veulent recomposer. Le problème, c’est qu’elle est attirée par Shay, le petit copain d’Honey. Et que c’est réciproque.

A première vue, qu’il s’agisse de la quatrième de couverture ou de la couverture elle même, tout sent le roman girly à souhait. Ce qu’il est. Mais il est cependant un peu plus profond qu’il n’en a l’air, abordant la question des relations familiales dans un sens large, du décès d’un proche à la difficulté de s’intégrer au sein d’une fratrie déjà constituée lorsqu’on est une enfant unique et solitaire par la force des choses. De surcroît, Cœur cerise a le mérite de poser également le problème des relations amoureuses lorsqu’on se trouve être des filles du même âge et, donc, en rivalité…

Les personnages adolescents sont attachants, même si l’accent dans ce volume est davantage mis sur les quatre aînées, au détriment de la plus jeune et des adultes, un peu effacés, malgré la création de leur entreprise chocolatière qui va constituer un des éléments de l’action. Le ton est un peu naïf, mais les situations s’enchaînent sans discontinuer et le tout est tout à fait plaisant à découvrir.

Effectivement, je revois très bien le visage fatigué et soucieux de Charlotte qui nous faisait signe de sortir, le téléphone à la main.

- C’est pour ça que Honey est sur les nerfs. Il n’y a vraiment qu’elle pour ne pas se rendre compte que papa est nul…

- Ah, d’accord. Je suis désolée…

- Pas la peine, répond Skye en haussant les épaules. Il n’a jamais vraiment assuré, comme père. Il fait de son mieux, mais je crois qu’il est trop égoïste, au fond. Et il était odieux avec maman. Il n’est jamais revenu nous voir. Une fois, il devait venir passer le week-end avec nous, quand maman était à Glasgow avec Paddy et toi, mais il a annulé au dernier moment et c’est une copine de maman qui a dû nous garder.

J’ouvre et referme la bouche sans réussir à dire un mot.

- Tu vois, quand tu disais le premier jour que était parfait ici, bah pas vraiment. Honey est en colère contre tout le monde. Par moments, on a l’impression de vivre avec une tornade. Et on dirait que maman a peur de lui dire quoique ce soit. Maintenant que vous êtes là, Paddy et toi, il va bien falloir que ça change.

Cathy CASSIDY, Coeur cerise.

Nathan

300 pages – 13,90 €

Titre  original : Cherry Crush – Paru en 2010 – Traduit en français en 2011

L’auteur : Cathy CASSIDY a écrit son premier livre à l’âge de huit ou neuf ans, pour son petit frère, et elle ne s’est pas arrêtée depuis.

Elle a souvent entendu dire que le mieux, c’est d’écrire sur ce qu’on aime. Comme il n’y a pas grand-chose qu’elle aime plus que le chocolat… ce sujet lui a longtemps trotté en tête. Puis, quand une amie lui a parlé de sa mère qui avait travaillé dans une fabrique de chocolat, l’idée de la série « les Filles au chocolat » est née !

Cathy vit en Ecosse avec sa famille. Elle a exercé beaucoup de métiers, mais celui d’écrivain est de loin son préféré, car c’est le seul qui lui donne une bonne excuse pour rêver !

Site de l’auteur (en anglais) : http://www.cathycassidy.com

08/06/2011

Le Signe de K1 - Le Temps des Tsahdiks (C. GRATIAS)

« Notre frère Yehuya s’est « effacé » à son tour ce matin. »

An 2322, les hommes s’effacent peu à peu, sans explication. Jusqu’à la vérité : les « pionniers » ont été manipulés. Envoyés sur Terre en 2020 pour préserver la survie des peuples futurs, ils découvrent que le virus envoyé propage la violence et que le président Tubal-K ne cherche qu’une chose : se protéger, lui et sa caste, et tuer « l’Ancêtre », à l’origine de la lignée des K2 et K3.

Curieux résumé, à la limite de l’incompréhensible ainsi dit, Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks est la suite de Le Signe de K1 – Le Protocole de Nod et la plupart des personnages du premier volume se retrouvent dans le second. Il est néanmoins tout à fait possible le second sans avoir pris connaissance du premier, chaque livre formant un tout et le second explicitant les développements du premier.

Claire GRATIAS a écrit un roman tout à fait passionnant, à la fois complexe et limpide. Complexe car sa construction est extrêmement subtile, jouant sur la chronologie, les allers-et-venues dans le temps, et ménageant à chaque chapitre ou presque un rebondissement inattendu. Et limpide cependant car la narration déroule son fil avec fluidité, les personnages sont extrêmement bien construits, avec beaucoup de finesse, et l’on s’attache à leur destin avec une angoisse mêlée d’espoir.

Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks ouvre une réflexion particulièrement intéressante sur notre société actuelle, ses dérives et ses limites. Roman de science-fiction, roman fantastique, avec ses voyages dans le temps et autres pouvoirs paranormaux, mais aussi roman de société, avec les thèmes de la manipulation politique des populations laissées dans l’ignorance par ses dirigeants, et roman d’amour enfin, Le Signe de K1 – Le Temps des Tsahdiks a tout pour plaire à différents publics.

- Mes jours sont désormais comptés, Menadel.

Le vieil homme ressentit une vive émotion. Cependant, pas un trait de son visage ne tressaillit.

- Que cherchaient-ils ? demanda-t-il calmement.

- Ils ont réussi à décoder l’iris de mes yeux, puis à partir de là, grâce à leurs connaissances extrêmement poussées en biométrie, ils sont remontés dix générations en arrière et ont reconstituer la signature iridienne de mon ancêtre. Celui qui vivait au XXIème  siècle…

- Vous voulez dire… l’Ancêtre ?

Oui. Grâce à son IrisCode, ils sont désormais en mesure de l’identifier. (…)

- Que comptez-vous faire, Commandeur ? demanda-t-il en rouvrant les paupières.

- Nous n’avons pas le choix : nous devons le trouver avant eux. Nous devons sauver l’Ancêtre.

Claire GRATIAS, Imago.

Soon - Syros

336 pages – 15,90€

Paru en 2011

Feuilleter un extrait : http://www.syros.fr/feuilletage/viewer.php?isbn=9782748510614

L’auteur : Née un an après "Les Tontons flingueurs", Claire GRATIAS ignorait alors que ce chef-d'œuvre deviendrait un jour son film culte. À cette époque, la télévision était en noir et blanc et ne proposait que deux chaînes. Restait la lecture. Elle s'y adonna avec ferveur. Sa deuxième grande passion était le cirque. C'est probablement ce qui la conduisit à rejoindre pour un temps le grand corps malade de l'Instruction Publique alors rebaptisée Nationale Éducation, où elle exerça durant quinze patientes années au cœur même de la cage aux fauves, sous les regards admiratifs de spectateurs frémissants d'angoisse et de compassion. Jusqu'au jour où elle se rappela cette sage maxime de l'oncle Fernand : « Quand la protection de l'enfance coïncide avec la crise du personnel, faut plus comprendre, faut prier… » Et elle s'enfuit nuitamment avec un trapéziste volant. Après un atterrissage forcé sur le toit d'une maison d'édition, elle décida de se reconvertir dans l'écriture (« Ah ! si c'est une œuvre… »). Depuis, elle rencontre régulièrement de gentils lionceaux gavés de télévision pour parler avec eux de livres noirs et blancs…