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21/07/2010

Blog (J-P. BLONDEL)

Blog blondel.jpg« Putain de merde. Je sais, ça choque et surtout, ça manque d’élégance. »

Parce que son père s’est permis de lire son blog, le narrateur décide cesser tout contact avec lui jusqu’à ses dix-huit ans. Il ne décolère d’avoir été ainsi visé, dévoilé, violé. Afin de rattraper les choses, Philippe, son père, va lui faire un cadeau : un carton. Boîte de Pandore, songe le narrateur. Il n’est pas si loin de la vérité…

En découvrant que son père, cet instituteur si moraliste trop souvent, comprenant de moins en moins son fils qui grandit, fut lui aussi un adolescent de quinze ans avec ses rages et des désespoirs, qu’il a eu des rêves et des ambitions, et que cela s’est  brutalement arrêté, le narrateur va plonger dans une captivante analyse en parallèle et découvrir un homme qu’il n’imaginait pas.

Court roman (moins de cent vingt pages), Blog est construit de manière tout à fait diabolique. D’une réflexion a priori initiale sur la notion d’espace public et d’espace privé sur la Toile, on aboutit à un récit dense qui pose la question de l’exposition de soi, de la création littéraire et de l’intimité ainsi mise à jour. Si le roman de Jean-Philippe BLONDEL est aussi intéressant, ce n’est pas parce qu’il s’en tient à la description d’une révolte adolescente, mais bien plutôt parce qu’il montre la démarche d’un écrivain en devenir. C’est également une lucide analyse de la vie qui passe, qui érode, construit et déconstruit. Une dangereuse mais néanmoins salutaire expérience de lecture !

C’est sûrement ça, grandir – abandonner petit à petit tous les attributs qui font de toi un des pions de ta génération pour aller plus profond et découvrir ce qui fait de toi un être unique. Aller vers l’individualisation, et non vers l’individualisme. Je n’invente rien – c’est ce que le prof de français a dit, l’autre jour, en parlant de l’évolution du roman. Je m’en souviens parce que j’ai noté la phrase, alors que jusque-là, je n’avais dessiné que des formes géométriques. Plus les mois passent, plus mes articles s’enrichissent et moins j’utilise des kiffe et des mouhaha. Quand la phrase s’allonge, la peau se dévoile. En me cachant sous les mots, je mets en scène le plus impudique des strip-teases.

Jean-Philippe BLONDEL, Blog.

Acte Sud Junior

114 pages – 10 €

Paru en 2010

L’auteur : Jean-Philippe BLONDEL a quarante-trois ans, il est marié, il a deux enfants et il enseigne l’anglais dans un lycée de province depuis bientôt vingt ans. Il a aussi un vice – il aime lire. Pire encore, il aime aussi écrire. Il a publié six romans jusqu’à présent.

SELECTIONNE POUR LE PRIX DES INCORRUPTIBLES 2011-2012 - CATEGORIE 3°-2nde

14/06/2010

Vango (T. DE FOMBELLE)

Vango.jpg« Quarante hommes en blanc étaient couchés sur le pavé. »

Paris, avril 1934. Un jeune homme de seize se prépare à être ordonné prêtre, mais un événement, brutal et inattendu, va venir tout faire basculer. C'est le début d'une errance, à travers le temps et l'histoire, depuis les îles éoliennes jusqu'en Amérique...

Peu à peu, le narrateur va nous reconstituer l'itinéraire de Vango, orphelin recueilli avec sa gouvernante sur l'île de Salina : son enfance, le mystère qui plane sur son arrivée, puis ses départs, ses rencontres et ses découvertes. Magnifique roman initiatique, Vango se clôt sur une promesse, celle d'un prochain tome : Un Prince sans royaume.

C'est à une plongée vertigineuse dans la première moitié du vingtième siècle que nous invite Timothée de FOMBELLE avec son roman. Son héros est magnifique, meurtri, seul, et cependant protégé par une multitude de personnages mystérieux qui se dressent au fil de ses chemins. Les personnages qui viennent à sa rencontre sont extraordinairement humains, originaux, un peu marginaux avec leur façon de suivre leur route, et l'ensemble crée un univers où il fait bon se complaire. Même si cet univers est à feu et à sang : la guerre de 14, la montée de Staline, tous ces fils s'entremêlent, créant une confusion où l'on pressent que la clef est Vango, lequel ne le sait pas lui-même...

L'écriture de Timothée de FOMBELLE est une écriture de voyageur, à l'instar de son personnage éponyme. La langue est riche, ciselée et polie comme un petit galet que l'on aurait ramassé sur une plage et que l'on garderait précieusement au fond de sa poche, la tâtant de temps en temps pour vérifier qu'elle est toujours là. L'histoire est un tourbillon d'aventures, humaines, romantiques, poétiques, cruelles, et c'est un bonheur de s'y immerger.

Vango poussa sur la pente de ce volcan éteint.

Il y a trouva ce dont il avait besoin.

Il grandit avec trois nourrices : la liberté, la solitude et Mademoiselle. A elles trois, elles firent son éducation. Il reçut d'elles tout ce qu'il croyait possible d'apprendre.

A cinq ans, il comprenait cinq langues mais ne parlait à personne. A sept ans, il grimpait les falaises sans avoir besoin des pieds. A neuf ans, il nourrissait les faucons qui plongeaient sur lui pour manger dans sa main. Il dormait torse nu sur les rochers avec un lézard sur le cœur. Il appelait les hirondelles en sifflant. Il lisait des romans français que sa nourrice achetait à Lipari. Il montait en haut du volcan pour se mouiller les cheveux dans les nuages. Il chantait des berceuses russes aux scarabées. Il regardait Mademoiselle couper les légumes avec des facettes impeccables comme on taille les diamants. Puis il dévorait sa cuisine de fée.

Timothée de FONTBELLE, Vango.

Gallimard Jeunesse

271 pages - 17€

Paru en 2010

L'auteur : Timothée de Fombelle est né en 1973. D'abord professeur de lettres, il se tourne tôt vers le théâtre. En 1990, il crée une troupe pour laquelle il écrit des pièces qu'il mettra lui-même en scène. Depuis, il n'a cessé d'écrire pour le théâtre.
Sa pièce Le phare, écrite à dix-huit ans, est traduite et jouée en Russie, Lituanie, Pologne et au Canada. Son texte Je danse toujours (Actes Sud) a été lu à l'ouverture du festival d'Avignon, en 2002. Tobie Lolness - La vie suspendue est son premier roman, publié en 2006 et traduit en vingt-six langues. Suivront la suite, Les yeux d'Elisha, en 2007, puis Céleste, ma planète, en 2008.

Autre extrait : La cuisine de Mademoiselle

SELECTIONNE POUR LES PRIX DES INCORRUPTIBLES 2011-2012 - CATEGORIE 5°-4°