04/03/2013
La femme du vampire (N. BLAZON)
« L’étranger frappa à notre porte au milieu de la nuit. »
La jeune Jasna vit avec ses six sœurs dans une cabane misérable avec un père alcoolique et brutal. Celui-ci la vend à un homme de passage qui cherche une épouse pour son fils Danilo. Une fois le mariage célébré et la nuit de noce passée, Danilo ne touchera plus jamais la jeune fille. Une rumeur court sur ce dernier : serait-il un vampire ? Et pourquoi empêche-t-on Jasna d’aller à l’église ? Tandis que le mystère plane, elle rencontre un jeune bûcheron, Dusan, dont elle tombe immédiatement amoureuse. Mais lui aussi cache un sombre secret…
Plongeant dans l’histoire noire de l’Europe centrale à la fin du XVIII° siècle, Nina BLAZON raconte une histoire d’amour et de mort, où s’entremêlent superstitions et histoire véritable, ignorance et sauvagerie. Son héroïne, Jasna, est une jeune paysanne aussi résolue que sensible et qui va découvrir, par son mariage forcé, un autre pays, une autre famille, et d’autres traditions. Si son destin est celui d’une héroïne presque ordinaire dans la littérature, l’est moins la description minutieuse et parfaitement documentée de cette région des Balkans, aux frontières de la Turquie, et de son passé tumultueux qui entraîna mélange de population, incompréhension et naissance des superstitions.
Car c’est bien de vampire qu’il s’agit, de pieu, d’ail, de crucifix, toute la mythologie est ici convoquée, les événements irrationnels se multiplient mais, peu à peu, c’est la raison qui va s’imposer pourtant, après bien des péripéties.
Roman aussi étrange que l’histoire qu’il déroule, cette Femme du vampire développe un rythme un peu particulier, croise des personnages un peu fantasques et se révèle assez étonnant, sans être toutefois complètement passionnant.
Danilo… Mon cœur bondit et s’emballa.
Mon fiancé secoua l'eau de pluie de ses cheveux noirs en me regardant droit dans les yeux. Son visage ne ressemblait que de loin à celui de Jovan ; il était plus étroit et plus fin, et ses yeux n'étaient pas verts mais bruns. Jelka n’aurait pas hésité à qualifier cet homme de joli et de bien bâti, mais je trouvais à ses lèvres quelque chose de cruel et de dur. Au moins, ce n’est pas un monstre, me dis-je. Je lui donnais dans les dix-neuf ans, il était donc déjà bien vieux pour se marier.
– C’est donc elle, dit-il doucement, tout en m’inspectant du regard. Et vous l’avez aussi déguisée. Dommage que la robe lui aille si mal.
Nina BLAZON, La Femme du vampire.
Seuil
396 pages – 16€
Titre original : Totenbraut – Paru en 2009 – Traduit en Français en 2010
L’auteur : Née en 1969, Nina BLAZON a publié plusieurs romans fantastiques et historiques, dont La Femme du vampire et La Nuit des pantheras au Seuil Jeunesse. Elle est passionnée d'histoire, très attachée aux mœurs et croyances populaires de l'Europe de l'Est et à l'histoire scientifique, médico-historique des vampires
Blog de l’auteur (en allemand) : http://www.ninablazon.de
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06/01/2011
Les Demoiselles de la Louisiane (J-E. SINGER)
« Sur un brick naviguant vers les rivages de Louisiane, comment une demoiselle peut-elle occuper les heures et les jours ? »
Les demoiselles touchent au but : elles ont accosté en Louisiane. C’est la découverte des plantations, du Mississipi et des « indigènes ». Mandaté par le régent, le duc de Gaumont doit surveiller le gouverneur, M. de Bienville, soupçonné de complots, et ses filles et nièces vont le seconder habilement, tout en découvrant les coutumes locales et nouant des amitiés avec la population locale.
Après un début un peu lent, car ressassant les événements passés, la seconde partie du roman devient tout à fait intéressante car elle propose une excursion dans les terres indiennes : nouveaux paysages, nouveaux comportements, dénonciation encore d’un certain esprit de colonisation, ce troisième volume propose une fois de plus un regard intelligent sur une période historique mal connue.
Blanche avait répliqué avait une violence qui ne lui était pas coutumière :
- Nous aussi nous avons été contraintes de quitter Paris, sans qu’on nous demande notre avis ! La Louisiane a beau être française, or je crains fort qu’elle ne soit surtout le pays des Indiens et que nous n’y ayons pas vraiment notre place. D’après ce que m’a raconté Sophie, nous avons fait beaucoup de mal aux Indiens… Je me souviens d’un poème de Dumont de Montigny : « Qui donc habitait ici avant la colonie ? C’étaient des habitants qui passaient leur vie à vivre de la chasse, et passaient tout leur temps sans envies ni chagrins, étaient tout contents. »
Je trouve que ces vers résument parfaitement la situation.
J. Esther SINGER, Les Demoiselles de la Louisiane.
Seuil
250 pages – 12€
Paru en 2010
Rappel : le tome 1 Les demoiselles du Palais-Royal ; le tome 2 : Les demoiselles de la Nouvelle-France ; le tome 3 Les demoiselles de la Louisiane
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03/05/2010
Miettes de lettres (A. THIOLLIER)
« Fengfeng a vu tout de suite l'éclat du papier bleu à travers la fente de la boîte aux lettres. »
Fengfeng et ses parents ont quitté la Chine pour trouver un avenir meilleur en France. Là-bas, reste la grand-mère de Fengfeng à qui ce dernier écrit toutes les semaines comme il lui a promis pour raconter sa nouvelle vie parisienne. Il a d'abord tenté de lui expliquer que la vie ici n'était pas si belle que ça, que la tour Eiffel, il ne l'avait toujours vue, et que les gens étaient loin d'être aimable avec lui, mais ses parents ont immédiatement réagi en lui demandant de ne pas l'inquiéter avec des choses pareilles. Depuis, Fengfeng raconte une vie imaginaire, où tout est plus beau, où il ne dort pas dans le salon et voit la tour Eiffel de sa chambre, où ses camarades de classe ne l'ignorent pas ou ne le menacent pas...
C'est un très joli roman qu'a écrit Anne THIOLLIER ; avec beaucoup de subtilité, elle raconte le grand écart que doivent faire un certain nombre d'enfants et adolescents scolarisés en France et comme coupés en deux : leur culture familiale d'un côté, qu'ils ne veulent pas perdre, mais qu'ils doivent mettre de côté afin de « s'intégrer ». Fengfeng est bon élève et, depuis que son professeur de mathématiques l'a encouragé, il veut devenir enseignant lui aussi.
Petit à petit, le jeune adolescent va apprendre à s'ouvrir aux autres, à ne plus baisser les yeux, à... se rebeller face aux intentions de son père et, pour finir, comprendre que cette différence qui est la sienne peut lui être fructueuse. Mais la route est dure.
Le lendemain est le jour de la rencontre annuelle parents professeur, qui est pour Fengfeng la pire épreuve de l'année scolaire. Pas question de les voir tous ! Une conversation avec le professeur principal, c'est le maximum que peut endurer l'adolescent qui doit servir d'interprète entre l'enseignant et son père. Ce dernier, rentré plus tôt du restaurant pour l'occasion, a mis son beau costume. Dans le préau, son fils lui répète :
- On n'est pas en Chine ! pas la peine de dire que je suis un sale gosse qui ne fiche rien ! Le genre politesse qui consiste à rabaisser ses propres enfants, personne connaît, ici ! Alors les dis pas, parce que je ne les traduirai pas ! Et puis, tu as de la chance, tu sais, je suis bon élève !
Le père défroisse ses manches d'un air vexé :
- Je sais, je sais !
« Il croit qu'il sait », songe Fengfeng dont le calvaire commence.
Anne THIOLLIER, Miettes de lettres.
Seuil Jeunesse
172 pages - 8,50 €
Paru en 2010
L'auteur : Anne Thiollier est née à Saint-Etienne où elle a suivi ses études aux Beaux-Arts. Elle hésite ensuite entre écrire et dessiner et finalement fait les deux. Elle habite pendant près de vingt ans entre Taiwan, la Chine et Hong Kong. Aujourd'hui elle vit à Paris et se consacre à l'écriture et à l'illustration de livres pour enfants.
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