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08/09/2010

Où vas-tu, Sunshine ? (S. DOWD)

Où vas-tu, Sunshine.jpg« Je déambulais d’un air dégagé le long de la file de véhicules, blonde à l’allure nonchalante dont les cheveux, ou plutôt la perruque, captaient les moindres rayons de lumière. »

Holly Hogan a quatorze ans. Depuis ses cinq ans, elle alterne séjours en famille d’accueil et retours au foyer, dont elle est une des plus anciennes. Dans ses rêves, il y a « la maison-du-ciel » où elle vivait avec sa mère et le petit ami de cette dernière, et puis l’Irlande, où elle veut aller pour retrouver la retrouver. Alors qu’elle est placée dans une nouvelle famille, elle va fuguer et partir, après avoir découvert le sésame qui la rend plus belle, plus forte, plus vieille : une perruque blonde… Sur la route, rencontres et souvenirs vont s’enchaîner.

Récit d’une résilience, le roman de Siobhan DOWD est d’une force incroyable. Sous ses dehors de récit de voyage, traçant une route qui va de Londres aux côtes irlandaises, Où vas-tu, Sunshine ? dessine le cheminement intérieure d’une petite fille perdue qui va grandir brutalement au fil de ses errances. Cette Holly aux airs d’oiseau tombé du nid qui se métamorphose en sculpturale  Sunshine, c’est autant un moyen de  dynamiser la narration qu’une manière de raconter, en filigrane, une autre histoire, celle qui émergera finalement : la  véritable.

Le point de vue interne – c’est Holly qui raconte – permet de jouer sur l’ambiguïté : c’est à la narratrice que l’on fait entièrement confiance et pourtant… En dépliant avec elle les replis de sa mémoire, les souvenirs mis à jour vont révéler des faits différents que ceux évoqués au début du texte, et c’est tout l’intérêt de ce roman que de ménager jusqu’à bout l’incertitude. Difficile, souvent dérangeant, Où vas-tu, Sunshine ? est à réserver aux lecteurs de quatorze ans et plus.

Je m’assis devant le miroir, tête baissée, et soufflai un grand coup. Puis je mis la perruque.

Je levai la tête et regardai dans le miroir. La pièce parut s’assombrir. Dehors, la pluie s’était changée en neige. Les faux cheveux blonds et mes vrais cheveux châtain foncé – des cheveux tout fin de bébé – se mêlaient le long des temps et du front. L’image que me renvoyait la glace, c’était moitié une Holly Hogan, moitié une cinglée d’étrangère. T’énerve pas, ma fille, me dis-je à moi-même. Arrange ça.

Le cœur battant, je rentrai soigneusement les petits cheveux fous plus foncés à l’intérieur de la résille. Après quoi, je brossai les longues, les magiques mèches blond cendré, les peignant en avant puis en arrière, rectifiant le tracé de la raie.

Quand j’eus fini, je posai la brosse et respirai à nouveau un bon coup avant d’allumer la lampe de chevet, de façon à refouler les ombres dans les coins de la pièce. Alors seulement je me regardai dans le miroir.

Siobhan DOWD, Où vas-tu, Sunshine ?

Scripto – Gallimard

348 pages – 13€

Titre original : Solace of the Road – Paru en 2009 – Traduit en français en 2010

L’auteur : Siobhan DOWD est née à Londres de parents irlandais. Elle a obtenu un diplôme de lettres classiques à l'université d'Oxford. Elle a vécu pendant sept ans à New York où elle dirigeait le PEN, une fondation d'écrivains qui œuvre pour la liberté d'écrire. Dans ce cadre, elle s'est rendue en Indonésie et au Guatemala pour enquêter sur l'application des droits de l'homme pour les écrivains. De retour en Angleterre, elle a poursuivi cette mission en faisant intervenir des écrivains dans des écoles défavorisées et dans des prisons.

Elle a écrit des nouvelles et des articles avant de publier Sans un cri, son premier roman, qui a recueilli les honneurs de la critique et a permis à son auteur d'avoir été élue parmi les vingt-cinq «auteurs du futur» par «The Guardian». En août 2007, à quarante-sept  ans, Siobhan DOWD est décédée d'un cancer du sein. La Parole de Fergus et Où vas-tu, Sunshine ? sont ses deux romans posthumes.

Les quatre romans pour la jeunesse de Siobhan DOWD constituent une œuvre littéraire magistrale d'autant plus précieuse qu'elle fut interrompue au summum de son accomplissement. Elle témoigne de son immense talent d'écrivain, de sa profonde passion pour la vie et de l'attachement qu'elle a toujours gardé pour l'Irlande où elle se rendait régulièrement.

Site internet : http://www.siobhandowdtrust.com  (tous les droits d’auteur de Siobhan DOWD sont reversés à cette fondation créée juste avant sa mort pour améliorer l’accès des jeunes à la lecture)

15/08/2010

La Face cachée de Margo (J. GREEN)

La face cachée de Margo.jpg« Voilà comment je vois les choses, tout le monde a droit à son miracle. »

Quentin termine sa dernière année du lycée. Pas très sportif, plutôt « intello », il appartient au clan de ceux qui ne sont pas populaires, les souffre-douleur qui rasent les murs pour éviter d’attirer sur eux les foudres des vedettes. Tout le contraire de Margo, la star du lycée. Voisine de Quentin, ils partagent également un secret enfoui dans leur enfance. Depuis, ils se côtoient, de loin. Jusqu’au soir où Margo va faire irruption dans la chambre de Quentin pour l’entraîner dans une expédition nocturne qui va le faire changer à jamais.

Roman initiatique, roman qui signe la fin de l’adolescence, La Face cachée de Margo tourne autour du personnage à la fois fascinant et agaçant de la fameuse Margo Roth Spiegelman. Ni toute à fait la même, ni toute à fait une autre, elle semble pivoter sur elle-même pour offrir à chacun la facette de ce qu’il a envie de voir. Quentin ne fera pas exception, choisissant de se mirer dans le miroir qu’elle lui tend pour devenir ce qu’il a toujours rêvé d’être : plus fort, plus audacieux.

Choisissant de confier la narration à son personnage masculin, John GREEN propose un récit qui ressemble à un périple vers la connaissance et l’âge adulte. Des poèmes de Walt WHITMAN tissent un réseau de fils qui permettront à Quentin de parvenir à la vérité sur Margo, une vérité où réalité et littérature s’entremêlent pour brosser un tableau d’une certaine adolescence, celle de lycéens américains dans leur banlieue douillette, celle – aussi – des séries américaines qu’affectionnent les adolescents de tous pays.

Une remarque : pourquoi n’avoir pas conservé le titre original de Villes de papier, beaucoup plus représentatif du roman que cette Face cachée de Margo ?

Voilà ce qui est laid dans cette ville, a-t-elle dit. D’ici, on ne voit pas la rouille ni la peinture écaillée ni je ne sais quoi, en revanche on peut dire avec certitude ce qu’elle est. Voir à quel point elle est factice, même pas assez solide pour être en plastique. C’est une ville de papier. Mais regarde là, Q. Regarde toutes ces impasses, ces rues qui tournent sur elles-mêmes, toutes ces maisons construites pour ne pas durer. Tous ces gens de papier vivant dans leur maison de papier, brûlant l’avenir pour avoir chaud. Tous ces gosses de papier buvant la bière qu’un clochard est allé acheter pour eux à l’épicerie en papier du coin. Tous atteints de possessite aiguë. Toute chose aussi fine que du papier, aussi fragile que du papier. Et les gens, idem. Ça fait dix-huit ans que je vis ici et je n’ai jamais rencontré personne qui s’intéresse vraiment aux choses importantes.

John GREEN, La Face cachée de Margo.

Scripto – Gallimard

390 pages – 14€

Titre original : PaperTowns – Paru en 2009 – Traduit en français en 2009

L’auteur : John GREEN est un écrivain américain qui a grandi en Floride avant de partir étudier dans l’Alabama. Il a été commentateur sur la radio nationale NPR et critique pour le «New York Times» et a écrit pour plusieurs magazines. Diplômé de l'université en 2000, il a travaillé comme aumônier dans un hôpital pour enfants. C'est là que l'envie lui est venue d'écrire pour les adolescents un roman sincère sur le désir de transgresser les règles et sur l'expérience de la perte. Il vit actuellement à New York avec sa femme. Après Qui es-tu Alaska ?, son premier roman publié en français, La Face cachée de Margo est son troisième roman, mais le second traduit.

Site internet : http://johngreenbooks.com

03/08/2010

13 Petites Enveloppes bleues (M. JOHNSON)

13petites enveloppes bleues.jpg« Chère Ginger, Je n’ai jamais beaucoup aimé les règles. Tu le sais. Alors tu vas sans doute trouver bizarre que cette lettre soit remplie de règles que j’ai établies et que je veux que tu suives. »

Ginny est une jeune américaine de dix-sept ans qui mène une vie bien rangée chez ses parents. Timide, un peu gaffeuse et plutôt introvertie, trop bien élevée, « trop normale », elle a cependant  toujours adoré rendre visite à sa tante Peg, la petite sœur de sa mère. Tante Peg, c’était la fantaisie à l’état pur, l’imprévisible permanent, l’absence totale de règles.

Le problème, c’est que tante Peg vient de décéder d’un cancer du cerveau et qu’elle a laissé à sa nièce chérie un gros paquet : à l’intérieur treize petites enveloppes bleues et une carte bancaire. Ginny va alors s’embarquer dans un périple qui va lui faire traverser l’Europe et rencontrer une foule de gens inattendus.

Le roman de Maureen JOHNSON propose une jolie vision de l’adolescence, moment des grandes découvertes et des timidités irraisonnées. En suivant les « consignes » de sa tante, Ginny va apprendre à se dépasser, à oser ce qu’elle n’aurait jamais tenté par elle-même, à grandir tout simplement.

Si ce premier roman de Maureen JOHNSON n’a pas le charme du suivant (Suite Scarlett), il en présente néanmoins nombre de caractéristiques communes : une héroïne un peu empruntée, découvrant l’amour et ses affres, un univers un peu bohème et un personnage fantasque qui jouera les initiatrices. 13 petites enveloppes bleues est rafraîchissant et saura séduire les jeunes filles dès onze-douze ans.

«Règle n° 1 : tu ne peux emporter que ce qui tiendra dans ton sac à dos.
Règle n° 2 : tu ne dois emporter ni guides de voyage ou de conversation, ni aucune aide pour les langues étrangères.
Règle n° 3 : tu ne peux pas prendre d'argent en plus, ni de carte de crédit, de chèques de voyage, etc.
Règle n° 4 : pas d'expédients électroniques. Ce qui signifie pas d'ordinateur portable, de téléphone portable, de musique, d'appareil photo.
C'est tout ce que tu as besoin de savoir pour l'instant. Rendez-vous à la Quatrième Nouille.»

Maureen JOHNSON, 13 Petites Enveloppes bleues.

Scripto – Gallimard

360 pages – 13€

Sorti en poche en juin 2010 – Pôle fiction – 6,60€

Titre original : 13 Little Blue Enveloppes – Paru en 2006 – Traduit en français en 2007

L’auteur : Maureen Johnson est née et a grandi à Philadelphie, en Pennsylvanie. Enfant, Maureen lisait sans arrêt, comme beaucoup de lecteurs qui finissent par écrire. Elle a étudié la dramaturgie et l'écriture romanesque à l'Université de Columbia. Avant de pouvoir vivre de sa plume, elle a pratiqué bon nombre de petits boulots de New York à Londres en passant par Las Vegas. Elle vit aujourd'hui à New York avec son mari.
Treize petites enveloppes bleues, son quatrième roman pour adolescents, était le premier publié en France. Suite Scarlett, le second, est paru en 2010.

Site internet : www.maureenjonhsonbooks.com

29/03/2010

Suite Scarlett (M. JOHNSON)

Suite Scarlett.jpg« Ce livre est dédié à quiconque a joué le rôle d'un corps mort, sur scène ou à l'écran. Il faut être très bon acteur pour demeurer allongé au sol en silence. Lâchez-vous, amis sans vie. »

Scarlett a une vie de rêve : elle habite New York, à hauteur de la Soixantième Avenue, non loin de Central Park, dans un hôtel Art Déco datant de la fin des années 20. Sauf que... cet hôtel,  ses parents en sont les propriétaires, et il n'est pas loin de tomber en ruine ! Plus de climatisation, très peu de clients, et des corvées à la pelle !

Résultat : alors que tous ses amis se préparent à des vacances plus excitantes les unes que les autres, l'été de Scarlett, celui de ses quinze ans, s'annonce atroce. Heureusement, l'arrivée d'une nouvelle cliente, à la fois mystérieuse et extravagante, va tout changer...

Drôle, juste, bien mené, le roman de Maureen Johnson a tout pour plaire aux filles à partir de treize ans. L'héroïne y est à la fois naïve et déterminée, les péripéties foisonnent : première histoire d'amour, découverte du milieu des « théâtreux » new yorkais, éloge de la fratrie, et surtout, Big Apple tient un rôle déterminant dans l'histoire, à la fois décor et partie-prenante de l'action. On ressort de cette lecture avec la furieuse envie de débarquer là-bas, et nous aussi voir le Chrysler Building depuis les fenêtres de l'hôtel Hopewell, «  à supposer que l'on efface les bâtiments construits au milieu... »

De façon générale, New York est la ville idéale pour fêter son anniversaire. On peut aller au spectacle, faire du shopping, déguster toutes sortes de plats et jouer au touriste. A bien réfléchir, tout ou presque est possible à New York.

Néanmoins, le bât peut blesser pour deux raisons : si vous êtes seul et si vous êtes dans la dèche. Imaginez par exemple qu'il reste environ seize dollars sur votre compte et que vous n'ayez aucune perspective pour le renflouer... Que vos amis soient éparpillés autour du monde, que votre sœur aînée travaille dix heures par jour, que votre petite sœur préfère vous voir brûler vive plutôt que de vous venir en aide, que votre grand frère, qui normalement aurait dû passer la journée avec vous, se concentre sur son propre parcours professionnel... Et encore, ça n'est pas tout. Vous vivez sur place, à New York, par conséquent vous connaissez par cœur tous les endroits à voir, et ces endroits à voir sont au pied de chez vous.

Maureen JOHNSON, Suite Scarlett.

Scripto - Gallimard

384 pages - 13€

Titre original : Suite Scarlett - Paru en 2008 - Traduit en français en 2010

L'auteur : Maureen Johnson est née et a grandi à Philadelphie, en Pennsylvanie. Enfant, Maureen lisait sans arrêt, comme beaucoup de lecteurs qui finissent par écrire. Elle a étudié la dramaturgie et l'écriture romanesque à l'Université de Columbia. Avant de pouvoir vivre de sa plume, elle a pratiqué bon nombre de petits boulots de New York à Londres en passant par Las Vegas. Elle vit aujourd'hui à New York avec son mari.