12/01/2014
Coeur de pierre (M. SELLIER)
« Le cri qui retentit dans la nuit du 4 au 5 mars 1913 réveilla Emile en sursaut. »
Mars 1913, au 19 quai de Bourbon, sur l’île de la Cité, à Paris. Le jeune Émile est réveillé en pleine nuit par un fracas épouvantable. Le bruit vient du logement du rez-de-chaussée où habite une femme étrange, une sorte de clocharde qui se barricade le jour et sort furtivement la nuit. Qui est-elle ?
Le lendemain, Hortense, la soeur d'Emile, se rend avec son amie Luce chez le célèbre sculpteur Rodin qui a proposé de faire leur portrait. Au fil de la conversation, Rodin évoque une mystérieuse artiste qui ressemble fort à la femme du rez-de-chaussée du 19 quai de Bourbon… Et si c’était elle ?
Toujours fidèle à ses biographies romancées d’artistes à l’intentions de la jeunesse, Marie SELLIER raconte ici les derniers jours de Camille Claudel, avant son internement, à travers les yeux d’un jeune garçon qui deviendra amateur d’art et n’oubliera jamais la « dame du rez-de-chaussée qui, un jour, lui avait caressé les cheveux ». Elle brosse le portrait - désormais popularisé grâce au cinéma notamment - d’une femme libre à une époque où il n’était pas facile de l’être et qui a payé cher sa rébellion.
Un jour où, de passage en France, il était allé lui rendre visite dans son atelier, il avait été effarée de la découvrir si changée. Grossie, les yeux cernés, et si effroyablement crasseuse, elle vociférait contre le monde entier. Même sa voix était autre. Elle était devenue métallique.
Il n’avait pas reconnu sa Camille tant aimée sous les traits épaissis de cette clocharde. Mais il était tombé en arrêt de vent la beauté de ses sculptures. Comme si toute l’humanité de sa soeur s’était concentrée dans ses créatures de plâtre ou de marbre.
Il avait écrit un article pour célébrer son talent. Mais la femme de chair, sa soeur, non vraiment, il ne souhaitait plus la voir. La fuite et l’oubli étaient préférables à la vision de sa déchéance.
Oublier Camille. Oui, il fallait l’oublier. Ne plus même évoquer son nom.
Marie SELLIER, Coeur de pierre
Nathan
170 pages – 5 €
Paru en 2013
Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092548134
L’auteur : Marie Sellier a été journaliste pendant plusieurs années avant de passer du côté de l’édition et de se consacrer à l’écriture. Voilà maintenant presque vingt ans qu’elle explore, en direction des enfants, un champ vaste comme le monde, l’ART sous toutes ses formes, avec un enthousiasme qui ne se dément pas. Résultat : une bonne soixantaine de livres et quatre collections ( L’Enfance de l’Art, Mon petit musée à la Réunion des musées nationaux, Des mains pour créer chez Paris-musées, Entrée libre chez Nathan).
L’Afrique petit Chaka, l’album qu’elle a imaginé avec la complicité de Marion Lesage à la RMN a reçu de nombreux prix (sorcière, Octogone 2001, prix de la jeunesse allemande, prix Andersen en Italie).
Elle a également écrit le scénario de plusieurs films de la série Artistes (France 5, Lapsus, RMN) en collaboration avec le réalisateur Michaël Gaumnitz, et celui du film, Moi, Van Gogh, (réalisation François Bertrand et Peter Knapp, production Camera Lucida, la Géode, prix du festival de la Géode 2009), premier film imax sur un peintre.
Nommée chevalier des Arts et des Lettres en juillet 2007, elle a été, pendant de nombreuses années, présidente de la Charte des auteurs et illustrateurs pour la jeunesse. Elle est administratrice de SOFIA et présidente déléguée du Conseil permanent des Écrivains.
Site de l’auteur : http://minisites-charte.fr/sites/marie-sellier
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15/07/2013
Sweet Sixteen (A. HEURTIER)
« Ms Carter jeta un regard circulaire dans la classe. »
Molly Costello est une jeune noire de quinze ans qui vit à Little Rock, en Arkansas. Comme huit autres jeunes gens, elle a accepté de participer au « processus d’intégration » qui vise à les faire entrer dans le prestigieux lycée central de Little Rock parmi deux mille cinq cents autres lycées. Tous blancs. Et bien peu disposés à abandonner leurs privilèges. Durant un an, elle va connaître le harcèlement, l’humiliation, la peur et la mise en danger permanente, malgré la surveillance de l’armée à l’intérieur du lycée. Ce sera une année d’une violence inouïe et où ces adolescents feront preuve d’un incroyable courage, reniés à la fois par « les blancs » mais aussi leur communauté, qui leur reproche de vouloir aller là où ils n’ont pas à être.
La plupart des événements retracés dans le roman d’Annelise HEURTIER sont fictionnels, néanmoins elle s’est inspirée de faits avérés et notamment du témoignage de Melba Patillo, qui poursuivit ses études en Californie et devint journaliste. En 1999, elle et les huit autres étudiants reçurent « the Congressionnal Gold Medal » et ils furent invités en décembre 2008 par Barack Obama afin d’assister à son investiture.
Sweet Sixteen est un roman qui réussit parfaitement à nous faire entrer dans cette époque des Fifties, trop souvent idéalisée (les trente Glorieuses, le rock, etc…) alors qu’elle étaient aussi celle des préjugés presque médiévaux, d’une ségrégation raciale intolérable dans les états du sud des Etats-Unis et d’un Klan omniprésent. En nous faisant partager le quotidien de deux jeunes filles, l’une noire, l’autre blanche, elle nous confronte à cette double réalité dans laquelle vivait la population de l’époque et amène à la réflexion.
Inspiré de faits réels, plaisant à lire dans son style mais glaçant dans les faits, ce Sweet Sixteen est une vraie réussite.
Elle suivit le groupe dans le couloir de marbre. Les regards malveillants et les insultes s’abattirent autour d’eux :
- Ça pue !
– Dehors les nègres !
- Putain, vous n’allez pas laisser entrer ces ratons laveurs ici ?
Molly n’était pas tellement surprise. Elle savait pertinemment que la majorité des Blancs n’était pas favorable à la mixité. Mais elle avait pensé que des jeunes se montreraient plus ouverts d’esprit, plus… civilisés.
Ce n’est que dans le bureau de lire Leroy Thompson, le principal, que Molly put enfin souffler. Ses jambes tremblaient. Elle croisa son reflet dans une glace dorée et se trouva déjà un air lamentable.
– Voici vos emplois du temps, expliqua Thomson après des brèves salutations d’usage. J’ai chargé des professeurs de vous accompagner jusque dans vos classes.
Bien qu’il lui semblat aussi cordial qu’une lame de rasoir, Molly envie d’embrasser. Jamais elle n’aurait osé affronter seule ces centaines de Blancs remonté comme des pendules.
Les neufs étudiants examinèrent les documents qu’on leur avait remis. Molly fronça les sourcils :
– Pourquoi ne sommes-nous pas tous ensemble, dans la même classe ?
– Vous avez voulu l’intégration ? Vous l’avez, rétorqua le principal, la voix tranchante.
Annelise HEURTIER, Sweet Sixteen.
Casterman
224 pages – 12€
Paru en 2013
Blog de l’auteur : http://histoiresdelison.blogspot.fr
L’auteur : Annelise HEURTIER est l’auteure d’une dizaine d’ouvrages pour la jeunesse dont Le Carnet rouge et La Fille aux cheveux d’encre, chez Casterman.
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10/07/2013
Le Secret du gladiateur (L. BAZIRE)
« Les sept hommes attendaient, impassibles. »
Marcus est effondré. Son père adoptif, le gladiateur Fulgur, s'est fait poignarder dans l'arène. Son adversaire n'a suivi aucune des règles en vigueur lors d'un combat et, Marcus en est convaincu, son coup était prémédité. Le sang du jeune Romain ne fait qu'un tour : il va mener son enquête, coûte que coûte. Les agressions qui se multiplient à son encontre ne font qu'ajouter à sa détermination… Il ne se doute pas, pourtant, que cela pourrait le mener à lever le voile sur le secret de ses origines.
Avec cette enquête dans les arènes de Rome, Laure BAZIRE fait coup double : nous proposer un roman mettant en scène l’univers des gladiateurs au premier siècle de notre ère et la quête identitaire d’un jeune adolescent entre deux univers. La peinture de la Rome antique, ses quartiers, ses mœurs, est très plaisante et les personnages très attachants.
Le Secret du gladiateur est une ouverture sur l’Antiquité tout à fait réussie et plaira sans nul doute aux jeunes lecteurs.
- L’or et le sang. La couleur du sable de l’arène. La vie de ton adversaire qui coule avec son sang. C'est un métier, petit, et ça, tu l’as ou tu l’as pas, avait-il lâché d’un seul trait.
Marcus secoua la tête à ce souvenir. C’était ce jour-là qu’il avait compris. L’envie de tuer, il ne l’avait jamais eu. Il avait vu cet éclat dur qui s’allumait dans les prunelles des combattants alors qu’ils entraient dans l’arène. Lui tremblait de peur, il fuyait les premiers coups échangés. L’envie de vaincre, ça, il l’avait ressentie. Mais pas celle de tuer, pas celle d’asséner un coup fatal. Il savait bien que les gladiateurs acceptaient ce principe : tuer ou être tué, jouer sa vie sur une feinte, jouir des acclamations de la foule pour un combat parfaitement magnifique. C’était cela qui se jouait dans la tête de ces hommes et qui lui restait étrangers. Lui, ce qu’il aimait, c’était… c’était quoi au fond ?
La question méritait un peu de réflexion. Marcus dessina du bout de sa sandale des cercles dans la poussière de la rue.
Laure BAZIRE, Le Secret du gladiateur.
Nathan
192 pages – 5€
Paru en 2013
Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092544075
L’auteur : Professeur de lettres, Laure BAZIRE aurait voulu les poulets créent des jardins. Elle a bien élevé des poules, mais les chiens les ont dévorés, alors elle laisse ses enfants, secoue les élèves et écrit des histoires qu’elle n’a pas vécues. Elle partage son temps entre Versailles et la Normandie.
Elle a eu un âne pendant longtemps (ceux qui ont lu Le singe de Buffon en ont entendu parler !), mais il est maintenant à la retraite dans une propriété voisine, après avoir tenté de s’introduire maintes fois dans le salon.
Co-auteur de romans sur le siècle des lumières, sur lequel porte sa thèse, elle a voulu cette fois faire partager son goût des textes antiques en imaginant le personnage de Marcus.
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01/06/2013
Sur un air de Mozart (F. TALAMON)
« Papa, le souper est servi, annonça Viki en se postant face à son père. »
Vienne, 1790. Viky et Luisa, douze et seize ans, vivent au deuxième étage d’une maison située à côté de celle de Mozart. Encore marquées par la mort de leur mère, quelques années plus tôt, les filles grandissent sous le regard bienveillant de leur père, riche fonctionnaire de l’Empire qui leur fait partager son amour de la musique. Mais, un jour, ce dernier annonce son remariage. Les deux sœurs se découvrent une belle-mère française, capricieuse et hostile. Le choc est brutal. Luisa rêve de fuite et Viky se réfugie chez leur voisin, M. Mozart…
En racontant la rencontre imaginaire entre un très jeune fille, musicienne, et le grand compositeur, Flore TALAMON apporte beaucoup d’humanité au grand personnage, le mettant en scène avec sa femme, ses enfants… Toutefois, elle n’en privilégie pas moins son personnage féminin et la jeune Viki, confrontée au monde et à ses rudesses, va faire l’apprentissage de la vie et de ses vicissitudes.
Sur un air de Mozart est un petit roman qui se lit facilement, plaira aux jeunes demoiselles et leurt fera découvrir la vie des jeunes filles à la fin du XVIII° siècle.
Alors, Viki, sans même réfléchir, entonna la berceuse de sa mère, Leise, Peterle, leise. M. Mozart l’écouta un instant en silence avant, discrètement, de jouer quelques accords pour accompagner son chant. Sur les frêles épaules de la berceuse, il bâtit un château s’élançant vers le ciel, un château aux mille clochetons résonnant d’autant de carillons, un château où régnaient la paix et l’harmonie. La jeune fille se tut, envoutée par ce bouquet de notes diaprées. C’est alors qu’une envolée de notes marqua le début d’un deuxième mouvement. Les accents devinrent plus intimes, plus secrets, et la musique donna corps à de nouveaux sentiments : la grâce se changeait en tendresse, la tendresse en douleur et la douleur en rêverie.
Flore TALAMON, Sur un air de Mozart.
Nathan
160 pages – 5€
Paru en 2013
Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092543665
L’auteur : Flore TALAMON est née à Paris en 1966 dans le quartier des libraires et des bouquinistes. Ce n’est pas un hasard. Un de ses aïeux a un jour ouvert une maison d’édition et le flambeau s’est passé de génération en génération. Pour elle, le livre était autant objet de jeu que fascinant réservoir d’histoires. Ses études, sciences politiques et MBA, l’ont entraînée loin de la littérature, vers les études de marché et le marketing. Après plusieurs années ainsi passées dans l’entreprise, la naissance de ses trois enfants a bouleversé ses priorités. C’est alors qu’elle a découvert le plaisir d’écrire. Elle me s’est essayée à la poésie, aux nouvelles, avant de devenir scénariste de bande dessinée, pigiste pour la presse enfantine puis auteur de romans pour la jeunesse. Son ambition : réussir à traduire en mots la spontanéité d’une âme d’enfant.
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04/03/2013
La femme du vampire (N. BLAZON)
« L’étranger frappa à notre porte au milieu de la nuit. »
La jeune Jasna vit avec ses six sœurs dans une cabane misérable avec un père alcoolique et brutal. Celui-ci la vend à un homme de passage qui cherche une épouse pour son fils Danilo. Une fois le mariage célébré et la nuit de noce passée, Danilo ne touchera plus jamais la jeune fille. Une rumeur court sur ce dernier : serait-il un vampire ? Et pourquoi empêche-t-on Jasna d’aller à l’église ? Tandis que le mystère plane, elle rencontre un jeune bûcheron, Dusan, dont elle tombe immédiatement amoureuse. Mais lui aussi cache un sombre secret…
Plongeant dans l’histoire noire de l’Europe centrale à la fin du XVIII° siècle, Nina BLAZON raconte une histoire d’amour et de mort, où s’entremêlent superstitions et histoire véritable, ignorance et sauvagerie. Son héroïne, Jasna, est une jeune paysanne aussi résolue que sensible et qui va découvrir, par son mariage forcé, un autre pays, une autre famille, et d’autres traditions. Si son destin est celui d’une héroïne presque ordinaire dans la littérature, l’est moins la description minutieuse et parfaitement documentée de cette région des Balkans, aux frontières de la Turquie, et de son passé tumultueux qui entraîna mélange de population, incompréhension et naissance des superstitions.
Car c’est bien de vampire qu’il s’agit, de pieu, d’ail, de crucifix, toute la mythologie est ici convoquée, les événements irrationnels se multiplient mais, peu à peu, c’est la raison qui va s’imposer pourtant, après bien des péripéties.
Roman aussi étrange que l’histoire qu’il déroule, cette Femme du vampire développe un rythme un peu particulier, croise des personnages un peu fantasques et se révèle assez étonnant, sans être toutefois complètement passionnant.
Danilo… Mon cœur bondit et s’emballa.
Mon fiancé secoua l'eau de pluie de ses cheveux noirs en me regardant droit dans les yeux. Son visage ne ressemblait que de loin à celui de Jovan ; il était plus étroit et plus fin, et ses yeux n'étaient pas verts mais bruns. Jelka n’aurait pas hésité à qualifier cet homme de joli et de bien bâti, mais je trouvais à ses lèvres quelque chose de cruel et de dur. Au moins, ce n’est pas un monstre, me dis-je. Je lui donnais dans les dix-neuf ans, il était donc déjà bien vieux pour se marier.
– C’est donc elle, dit-il doucement, tout en m’inspectant du regard. Et vous l’avez aussi déguisée. Dommage que la robe lui aille si mal.
Nina BLAZON, La Femme du vampire.
Seuil
396 pages – 16€
Titre original : Totenbraut – Paru en 2009 – Traduit en Français en 2010
L’auteur : Née en 1969, Nina BLAZON a publié plusieurs romans fantastiques et historiques, dont La Femme du vampire et La Nuit des pantheras au Seuil Jeunesse. Elle est passionnée d'histoire, très attachée aux mœurs et croyances populaires de l'Europe de l'Est et à l'histoire scientifique, médico-historique des vampires
Blog de l’auteur (en allemand) : http://www.ninablazon.de
11:54 Publié dans Fantastique, Historique | Lien permanent | Tags : seuil jeunesse, blazon, vampire, malédiction | | Facebook | |