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25/08/2013

Mary-Lou (S. CASTA)

« C’est l’heure de pointe.»

IMG_0601.JPGAdam et Mary Lou se retrouvent pour passer quelques jours dans une maison au bord d’un lac. Amis d’enfance, ils s’étaient perdus de vue depuis trois ans, depuis « l’accident » qui a cloué Mary Lou sur une chaise roulante. Au cours de cette période, Mary Lou a beaucoup changé, pas seulement physiquement, elle est agressive, ironique et a totalement perdu sa joie de vivre. Adam s’efforce d’être compréhensif mais en a vite assez de la mauvaise humeur de son amie. L’action se déroule l’espace d’un été avec des flashbacks vers l’accident fatal, trois ans auparavant, qui expliquent la raison de la séparation des familles amies et l’état physique et psychique de Mary Lou. Adam espère trouver une réponse à la question qui le hante depuis longtemps : Mary Lou a-t-elle voulu se suicider ou était-ce un accident ?

Étonnant roman qui met en scène deux adolescents livrés à eux même dans un coin perdu de Suède. La nature omniprésente, les souvenirs envahissants, les réactions à fleur de peau, tout concourt à faire de cette histoire le récit d’une résilience qui ne dit pas son nom. Les deux héros, Adam le narrateur et Mary-Lou l’héroïne déchue, sont dépeints avec beaucoup de finesse et de réalisme et, peu à peu, le lecteur va tisser la toile déchirée depuis ce fameux été.

Évoquant crûment le handicap, la souffrance, l’adolescence et ses affres, Stefan CASTA réussit u  très beau roman, baigné par la lumière bien particulière des rivages suédois l’été.

- La vie est quand même étrange, dit-elle. La dernière fois qu’on était ici ensemble, j’avais douze ans et je fonçais sur un Finn dériveur. Sa voile dégoulinait d’eau pendant des heures tellement elle était mouillée. Je rêvais de faire le tour du monde à la voile.

Ne trouvant pas de commentaire approprié, je me tais.

- Et maintenant, poursuit-elle, j’ai quinze ans et je me déplace en fauteuil roulant. Je ne ferai pas le tour du monde. Pas grand-chose d’autre non plus, probablement. Je me rappelle que je rêvais de voir la tour Eiffel. Mes parents avaient parlé d’aller à Paris pendant les vacances. Je n’irai probablement pas non plus à Paris. Du moins, je ne monterai pas en haut de la tour Eiffel. Je n’ai plus assez de force pour ce genre de choses. Plus assez de force pour quoi que ce soit, d’ailleurs. C’est comme si une partie de moi s’était étiolée…

Elle se tait. Il faut que je trouve quelque chose à dire.

- Tu es encore la même personne. Avec trois ans de plus, c’est tout. Tu es une fille de quinze ans comme une autre. Ce truc-là n’a aucune importance, j’ajoute en donnant un coup de pied dans le fauteuil.

- Non, pas pour ceux qui peuvent s’en passer. Une certaine manière tu as raison, je commence à m’habituer.

Stefan CASTA, Mary-Lou

Editions Thierry Magnier

304 pages – 17 €

Titre original : Fallet Mary-Lou – Paru en 1997 – Traduit en Français en 2012

L’auteur :  Stefan CASTA est journaliste et a reçu le prestigieux prix Auguste en 1999 et le prix Niels Holgerson en 2000 pour ce roman, ainsi que le prix Astrid Lindgren en 2002 pour l'ensemble de son œuvre.

Le site de l’auteur (en suédois): http://www.stefancasta.com

24/08/2013

La Dernière Petite Enveloppe Bleue (M. JOHNSON)

« C’était encore ce moment de la journée. Le moment de regarder fixement cette question, ces deux lignes noires sur une page blanche. »

IMG_0571.JPGGinny Blackstone pensait avoir vécu la plus grande aventure de sa vie l'été de ses dix-sept ans. Treize petites enveloppes bleues, léguées par sa tante adorée avant de mourir, l'avaient envoyée à la découverte de l'Europe et d'elle-même, seule avec son petit sac à dos. Treize... moins une, qui avait disparu avec le vol de son sac. Quelques mois plus tard, Ginny reçoit un mystérieux message d'Angleterre : un certain Oliver a récupéré la fameuse enveloppe. Sa dernière aventure l'attend, de Londres à Paris, d'Amsterdam à Dublin, cette fois accompagnée d'un ex, d'un futur et d'une rivale...

Si le premier volume des aventures de Ginny se déroulait tambour battant, cette suite est loin d’être aussi palpitante. Maureen JOHNSON reprend les recettes qui ont fait le succès du premier : une héroïne un peu gaffeuse, des personnes loufoques, des voyages, mais la magie a disparu. Ne reste plus qu’une bande d’adolescents montés en graine, souvent insupportables et un peu vains.

- On ferait mieux d’y aller, dit-il en remettant la carte dans poche.

- Sérieusement, tu n’es pas… sérieux ?

- Je suis on ne peut plus sérieux. Si tu étais tombée sur quelqu’un d’autre, tu ne serais même pas au courant de tout ça. En échange, je t’aiderai à recomposer l’œuvre d’art. De toute façon, tu viens de me dire que tu te fichais de l’argent, alors quel est le problème ?

- Et si je refuse ?

- Alors je rentre chez moi.

- Et la lettre ?

- Demeurera perdue. A toi de choisir.

Maureen JOHNSON, La Dernière Petite Enveloppe bleue.

Scripto – Gallimard

330 pages – 13,50€

Lire un extrait : http://flipbook.cantook.net/?d=http%3A%2F%2Fwww.edenlivres.fr%2Fflipbook%2Fpublications%2F27917.js&oid=41&c=&m=&l=&r=&f=pdf

Titre original : The Last Little Blue Enveloppe – Paru en 2011 – Traduit en français en 2013

L’auteur : Maureen Johnson est née et a grandi à Philadelphie, en Pennsylvanie. Enfant, Maureen lisait sans arrêt, comme beaucoup de lecteurs qui finissent par écrire. Elle a étudié la dramaturgie et l'écriture romanesque à l'Université de Columbia. Avant de pouvoir vivre de sa plume, elle a pratiqué bon nombre de petits boulots de New York à Londres en passant par Las Vegas. Elle vit aujourd'hui à New York avec son mari.
Treize petites enveloppes bleues, son quatrième roman pour adolescents, était le premier publié en France. Suite Scarlett, le second est paru en 2010.

Site internet : www.maureenjonhsonbooks.com

Ma Vie toute pourrie (J. SMITH)

« Je m’appelle Sam Wallis, j’ai treize ans, et ma vie est officiellement fichue.»

smith, nathan,adolescente,amitié,relations familialesAinsi commence le nouveau roman de Jenny SMITH, auteur du Journal de Katie Sutton. Son héroïne  s’appelle Sam, vit avec ses parents (mère infirmière et père boucher) et un grand frère de seize ans. Le drame ? Gemma, sa meilleure amie « du monde entier », vient de déménager à des millions de kilomètres. Avec elle, elle dressait des listes de « points positifs / points négatifs », et elle assumait ses sweats roses avec des chevaux. Maintenant qu’elle est partie, tout ce qu’elle faisais lui semble nul et puéril et Sam en arrive à se demander si ce n’est pas elle qui serait nulle et puérile. Surtout après s’être ridiculisée à vie devant David Matthieson, alors qu’il lui avait souri !

Si le précédent roman de Jenny SMITH présentait quelques faiblesses, des traits trop grossièrement esquissés et une intrigue languissante parfois, elle réussit avec Ma Vie toute pourrie un livre hilarant d’un bout à l’autre, mais qui n’écarte pas pour autant les problématiques typiques de l’adolescence : la quête de soi, la relation aux autres et la difficile découverte du monde des adultes. Le divorce, l’alcoolisme, Facebook, la pression sociale, tous ces thèmes sont présents et intelligemment traités.

Alternant narration à la première personne, extraits de discussion par mail et pages Facebook, ce roman se dévore en un clin d’œil et plaira aux adolescentes de 11 à 15 ans à coup sûr.

Papa n’est pas petit, mais il n'est pas vraiment grand non plus. Il est plutôt compact, musclé et poilu. Bon, à m’entendre, on dirait un nain du Seigneur des anneaux, alors que pas du tout. Il a un visage tout rouge, tout rond et souriant, des cheveux et des gros sourcils noirs, et toujours l’air mal rasé quoi qu’il fasse. Il est pas mal, mais il n’est pas beau comme maman est belle.

- Joyeux anniversaire ! a-t-il claironné en brandissant un sac en plastique comme un trophée. J’ai un cadeau pour toi !

Mon cœur s’est serré; c’était un sac à rayures de la boucherie. Il y avait même des traces de sang sur le papier à l’intérieur.

Papa a continué à brandir son sac comme s’il contenait un collier de diamants.

- Hé non, ça n’est pas du porc ! J’avais dit ça pour brouiller les pistes. Pour fêter nos vingt ans de vie commune, je nous ai rapporté le meilleur faux-filet que tu aies jamais mangé !

Maman a gardé le nez plongé dans ses mots croisés comme si elle n’avait rien entendu. Papa n’a pas reçu le message ; il est sur sa planète. Il s’est frotté les mains avec satisfaction.

–Ça va être le dîner de notre vie !

 Maman a levé les yeux pour demander :

– « Sentiment éprouvé quand vos attentes ne se réalisent pas. » En neuf lettres. La première est un D.

Puis elle est montée à l’étage.

–Euh… neuf lettres… je sèche, a dit papa, totalement sur sa planète, donc.

- « Déception », ai-je dit.

Jenny SMITH, Ma Vie toute pourrie

Nathan

280 pages – 14,50 €

Titre original : My Big Fat Teen Crisis – Paru en 2012 – Traduit en Français en 2012

Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092547540

L’auteur : Jenny SMITH est née à Glasgow, au Royaume-Uni.  Son enfance a été bercée par les histoires que racontait son père, un excellent conteur, qui lui a transmis sa passion pour le récit. Elle a étudié la littérature anglaise à l’université de Glasgow et vit aujourd’hui avec son mari et leurs deux fils dans un petit village du comté d’Oxford.

Le site de l’auteur (en anglais): http://www.jennysmithonline.com

15/07/2013

Sweet Sixteen (A. HEURTIER)

« Ms Carter jeta un regard circulaire dans la classe. »

IMG_0455.JPGMolly Costello est une jeune noire de quinze ans qui vit à Little Rock, en Arkansas. Comme huit autres jeunes gens, elle a accepté de participer au « processus d’intégration » qui vise à les faire entrer dans le prestigieux lycée central de Little Rock parmi deux mille cinq cents autres lycées. Tous blancs. Et bien peu disposés à abandonner leurs privilèges. Durant un an, elle va connaître le harcèlement, l’humiliation, la peur et la mise en danger permanente, malgré la surveillance de l’armée à l’intérieur du lycée. Ce sera une année d’une violence inouïe et où ces adolescents feront preuve d’un incroyable courage, reniés à la fois par « les blancs » mais aussi leur communauté, qui leur reproche de vouloir aller là où ils n’ont pas à être.

La plupart des événements retracés dans le roman d’Annelise HEURTIER sont fictionnels, néanmoins elle s’est inspirée de faits avérés et notamment du témoignage de Melba Patillo, qui poursuivit ses études en Californie et devint journaliste. En 1999, elle et les huit autres étudiants reçurent « the Congressionnal Gold Medal » et ils furent invités en décembre 2008 par Barack Obama afin d’assister à son investiture.

Sweet Sixteen  est un roman qui réussit parfaitement à nous faire entrer dans cette époque des Fifties, trop souvent idéalisée (les trente Glorieuses, le rock, etc…) alors qu’elle étaient aussi celle des préjugés presque médiévaux, d’une ségrégation raciale intolérable dans les états du sud des Etats-Unis et d’un Klan omniprésent. En nous faisant partager le quotidien de deux jeunes filles, l’une noire, l’autre blanche, elle nous confronte à cette double réalité dans laquelle vivait la population de l’époque et amène à la réflexion.

Inspiré de faits réels, plaisant à lire dans son style mais glaçant dans les faits, ce Sweet Sixteen est une vraie réussite.

Elle suivit le groupe dans le couloir de marbre. Les regards malveillants et les insultes s’abattirent autour d’eux :

- Ça pue !

– Dehors les nègres !

- Putain, vous n’allez pas laisser entrer ces ratons laveurs ici ?

Molly n’était pas tellement surprise. Elle savait pertinemment que la majorité des Blancs n’était pas favorable à la mixité. Mais elle avait pensé que des jeunes se montreraient plus ouverts d’esprit, plus… civilisés.

Ce n’est que dans le bureau de lire Leroy Thompson, le principal, que Molly put enfin souffler. Ses jambes tremblaient. Elle croisa son reflet dans une glace dorée et se trouva déjà un air lamentable.

– Voici vos emplois du temps, expliqua Thomson après des brèves salutations d’usage. J’ai chargé des professeurs de vous accompagner jusque dans vos classes.

Bien qu’il lui semblat aussi cordial qu’une lame de rasoir, Molly envie d’embrasser. Jamais elle n’aurait osé affronter seule ces centaines de Blancs remonté comme des pendules.

Les neufs étudiants examinèrent les documents qu’on leur avait remis. Molly fronça les sourcils :

– Pourquoi ne sommes-nous pas tous ensemble, dans la même classe ?

– Vous avez voulu l’intégration ? Vous l’avez, rétorqua le principal, la voix tranchante.

Annelise HEURTIER, Sweet Sixteen.

Casterman

224 pages – 12€

Paru en 2013

Blog de l’auteur : http://histoiresdelison.blogspot.fr

L’auteur : Annelise HEURTIER est l’auteure d’une dizaine d’ouvrages pour la jeunesse dont Le Carnet rouge et La Fille aux cheveux d’encre, chez Casterman.

10/07/2013

Le Secret du gladiateur (L. BAZIRE)

« Les sept hommes attendaient, impassibles. »

Le secret du gladiateur.JPGMarcus est effondré. Son père adoptif, le gladiateur Fulgur, s'est fait poignarder dans l'arène. Son adversaire n'a suivi aucune des règles en vigueur lors d'un combat et, Marcus en est convaincu, son coup était prémédité. Le sang du jeune Romain ne fait qu'un tour : il va mener son enquête, coûte que coûte. Les agressions qui se multiplient à son encontre ne font qu'ajouter à sa détermination… Il ne se doute pas, pourtant, que cela pourrait le mener à lever le voile sur le secret de ses origines.

Avec cette enquête dans les arènes de Rome, Laure BAZIRE fait coup double : nous proposer un roman mettant en scène l’univers des gladiateurs au premier siècle de notre ère et la quête identitaire d’un jeune adolescent entre deux univers. La peinture de la Rome antique, ses quartiers, ses mœurs, est très plaisante et les personnages très attachants.

Le Secret du gladiateur est une ouverture sur l’Antiquité tout à fait réussie et plaira sans nul doute aux jeunes lecteurs.

- L’or et le sang. La couleur du sable de l’arène. La vie de ton adversaire qui coule avec son sang. C'est un métier, petit, et ça, tu l’as ou tu l’as pas, avait-il lâché d’un seul trait.

Marcus secoua la tête à ce souvenir. C’était ce jour-là qu’il avait compris. L’envie de tuer, il ne l’avait jamais eu. Il avait vu cet éclat dur qui s’allumait dans les prunelles des combattants alors qu’ils entraient dans l’arène. Lui tremblait de peur, il fuyait les premiers coups échangés. L’envie de vaincre, ça, il l’avait ressentie. Mais pas celle de tuer, pas celle d’asséner un coup fatal. Il savait bien que les gladiateurs acceptaient ce principe : tuer ou être tué, jouer sa vie sur une feinte, jouir des acclamations de la foule pour un combat parfaitement magnifique. C’était cela qui se jouait dans la tête de ces hommes et qui lui restait étrangers. Lui, ce qu’il aimait, c’était… c’était quoi au fond ?

La question méritait un peu de réflexion. Marcus dessina du bout de sa sandale des cercles dans la poussière de la rue.

Laure BAZIRE, Le Secret du gladiateur.

Nathan

192 pages – 5€

Paru en 2013

Feuilleter un extrait : http://www.nathan.fr/feuilletage/?isbn=9782092544075

L’auteur : Professeur de lettres, Laure BAZIRE aurait voulu les poulets créent des jardins. Elle a bien élevé des poules, mais les chiens les ont dévorés, alors elle laisse ses enfants, secoue les élèves et écrit des histoires qu’elle n’a pas vécues. Elle partage son temps entre Versailles et la Normandie.

Elle a eu un âne pendant longtemps (ceux qui ont lu Le singe de Buffon en ont entendu parler !), mais il est maintenant à la retraite dans une propriété voisine, après avoir tenté de s’introduire maintes fois dans le salon.

Co-auteur de romans sur le siècle des lumières, sur lequel porte sa thèse, elle a voulu cette fois faire partager son goût des textes antiques en imaginant le personnage de Marcus.