12/08/2010
Le livre du temps - La Pierre sculptée (G. PREVOST)
« Samuel se laissa tomber en grommelant sur son lit : aucune envie de sortir.»
Samuel Faulkner vit avec son père depuis le décès accidentel de sa mère. Libraire, ce dernier s’absente souvent pour partir à la recherche de livres rares. Le problème, c’est qu’il n’a jamais laissé aussi longtemps son fils sans nouvelles que cette fois-ci. Décidé à partir à sa recherche, Sam va découvrir au fond de la cave une mystérieuse pierre qui a le pouvoir de faire voyager. Dans le temps.
Roman d’aventures, roman policier, roman fantastique, La Pierre sculptée est tout cela à la fois. On se laisse très facilement entraîné à la suite de Sam pour découvrir l’Irlande au dixième siècle, l’Égypte ancienne ou encore Bruges au temps de Van Eyck.
A la fois érudite et divertissante, l’écriture de Guillaume PREVOST sonne parfaitement juste, familière juste ce qu’il faut pour la crédibilité de ses personnages adolescents sans toutefois trop en faire. Les descriptions sont justes et vivantes, l’action bien menée, ce premier volume de la trilogie est une réussite.
Qu’est-ce qui lui était arrivé ? Et ses vêtements ? Où ETAIENT SES VETEMENTS ? Son jean, son tee-shirt ? Il n’avait plus sur lui qu’une espèce de chemise de nuit grossière, trempée de sueur, qui lui couvrait les bras et les jambes. Et qui le grattait, au passage. Et ses brûlures ? Il sentait encore la morsure du feu qui l’avait consumé lorsqu’il avait touché la pierre. Une torche humaine, pas moins… Et pourtant, sa peau était miraculeusement intacte, aussi rose que celle d’un bébé. Comme si tout cela n’avait été qu’un rêve.
Guillaume PREVOST, Le Livre du temps – La Pierre sculptée.
Gallimard Jeunesse
236 pages – 14,50 €
Paru en 2006 – Sorti en poche en 2008 chez Folio Gallimard
L’auteur : Guillaume Prévost est né en 1964 à Antananarivo, sur l'île de Madagascar. Ancien élève de l'École normale supérieure, professeur agrégé d'histoire, il enseigne dans un lycée de la région parisienne. Il a collaboré à la chaîne « Histoire » et écrit divers ouvrages spécialisés avant de se lancer dans la littérature. Nourries de sa passion pour l'histoire, ses fictions développent aussi un art consommé de l'intrigue policière. Le Livre du temps, son premier texte destiné à la jeunesse, mêle la grande aventure aux tableaux historiques les plus saisissants. La Pierre sculptée, le premier tome de la trilogie, connaît un vif succès, y compris au-delà des pays francophones, notamment au Royaume-Uni, en Thaïlande, aux États-Unis, en Chine, en passant par l'Espagne et le monde latino-américain.
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10/08/2010
En un tour de main (J. WITEK)
« Elle était plutôt jolie, la journaliste.»
Matt est un magicien célèbre. Malgré sa jeunesse, il a remporté une multitude de prix internationaux, fait la Une des magazines et a même sa propre émission de télévision. C’est ce qui va attirer sur lui l’attention d’une jeune journaliste, Isadora, qui va venir l’interviewer. Matt va alors dérouler le fil d’une vie inattendue, celle d’un jeune homme qui n’a pas toujours suivi un chemin très rectiligne mais qui a toujours gagné sa passion intacte.
Construit avec finesse, car alternant la narration directe de Matt et son relais par la journaliste, à la troisième personne, Jo WITEK offre ici un intéressant témoignage sur « la vie d’artiste » et son long cheminement pour y parvenir. Les allers-retours entre passé et présent, loin d’être pesant, apportent dynamisme et finesse à l’histoire, les uns éclairant les autres.
L’histoire de ce gamin orphelin de mère, qui vit d’expédients avec son père et son frère et qui devra s’en affranchir pour avancer, est touchante, morale sans être moralisante, et plaira aux lecteurs à partir de onze ans.
Pour un gamin comme moi, ce musée représentait le paradis terrestre. La plus belle chose qui puisse exister au monde ! reprit-il face à la journaliste tout ouïe. Et ce qui était encore plus merveilleux, c’était le visage de mon père, qui semblait retrouver une jeunesse, un sourire de môme au milieu de ce bric-à-brac de pacotille. En une matinée, je fis la connaissance d’un univers formidable où le moindre détail m’apparut comme une révélation. Ce monde était le mien ! Et tous ces hommes drapés de capes noir et rouge, coiffés d’un haut-de-forme, inventant sans cesse d’incroyables stratagèmes pour épater le spectateur, tous me semblaient proches, intimes, comme des parents, des grands-parents. J’étais certainement né magicien, descendant direct de cette lignée d’hommes aux regards insaisissables et aux sourires en coin.
Jo WITEK, En un tour de main.
Karactère(s) - Seuil
158 pages – 8,50 €
Paru en 2010
L’auteur : Jo Witek est née en 1968 à Puteaux, sur les bords de Seine, qu’elle n’a quitté qu’à l’âge de trente-cinq ans pour s’installer dans l’Hérault avec sa « tribu » de garçons (deux enfants et un mari). A l’âge de treize ans, elle a commencé par se faire renvoyer de chez les bonnes sœurs à cause de dizaines de lettres d’amour et d’amitié retrouvées dans son casier. A partir de cet incident l’expression artistique lui est devenue vitale. Elle a suivi une formation de comédienne et a travaillé comme scénariste ou lectrice pour le cinéma. Aujourd’hui son chemin se dirige vers l’écriture pour les adolescents.
Plus sur l’auteur : http://www.autour-des-auteurs.net/fiches/witek_lengagne.html
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08/08/2010
J'ai quinze ans et je ne l'ai jamais fait (M. LETHIELLEUX)
« J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait. Voilà.»
Capucine et Martin sont en troisième. Ils se côtoient tous les jours mais ne se connaissent pas. Pour lui, elle est l’intello, pour elle, il est le schtroumpf. Elle ne rêve qu’à sa « première fois », déteste ses parents trop étriqués et les autres en général. Lui ne pense qu’à la musique, joue de la basse et se prépare à un premier concert avec son groupe. Le hasard – et leur professeur d’Histoire-Géographie – va finalement les rapprocher.
Roman à deux voix, celle de la jeune fille et celle du garçon, qui joue sur les typographies, J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait n’est pas ce qu’il paraît. Loin de détailler la vie sexuelle des adolescents, il expose au contraire ce délicat moment du « homard », pour reprendre l’expression de Françoise Dolto, ce temps où l’on offre aux autres une carapace d’indifférence alors que tout explose à l’intérieur, et que les sensations sont démultipliées à la puissance dix.
Si le roman de Maud LETHIELLEUX peut agacer, notamment au début, avec son héroïne qui ne cesse de se regarder le nombril en fantasmant une hypothétique vie sexuelle – la sienne et celle des autres – il devient très vite prenant et finit par vous emporter complètement dans ce tourbillon, vous retournant jusqu’à la fin, à la fois inattendue et délicate.
D’où je suis c’est pratique, il suffit que je me cale contre le mur et je peux observer tous les élèves de derrière. Ils sont tous concentrés. Sauf celle qu’est juste derrière moi, la seule plus nulle que moi, qui s’admire dans son miroir. A côté d’elle, l’intello vérifie son devoir avec une tête d’enterrement. Elle est toujours comme ça, l’intello : quand elle rend une copie, on pourrait penser qu’elle a tout foiré, mais quand la prof lui rend le devoir corrigé, elle fait l’indifférente qui savait qu’elle aurait au moins dix-huit.
Maud LETHIELLEUX, J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait.
Éditions Thierry Magnier
201 pages – 9 €
Paru en 2010
L’auteur : Maud Lethielleux est musicienne et metteur en scène. Elle a parcouru le monde, de l’Asie à la Nouvelle-Zélande. Elle a publié Dis oui Ninon chez Stock en 2009, puis D’où je suis, je vois la lune, son deuxième roman. J’ai quinze ans et je ne l’ai jamais fait est son premier roman pour la jeunesse.
Site de l’auteur : http://maudetlesmots.free.fr
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03/08/2010
13 Petites Enveloppes bleues (M. JOHNSON)
« Chère Ginger, Je n’ai jamais beaucoup aimé les règles. Tu le sais. Alors tu vas sans doute trouver bizarre que cette lettre soit remplie de règles que j’ai établies et que je veux que tu suives. »
Ginny est une jeune américaine de dix-sept ans qui mène une vie bien rangée chez ses parents. Timide, un peu gaffeuse et plutôt introvertie, trop bien élevée, « trop normale », elle a cependant toujours adoré rendre visite à sa tante Peg, la petite sœur de sa mère. Tante Peg, c’était la fantaisie à l’état pur, l’imprévisible permanent, l’absence totale de règles.
Le problème, c’est que tante Peg vient de décéder d’un cancer du cerveau et qu’elle a laissé à sa nièce chérie un gros paquet : à l’intérieur treize petites enveloppes bleues et une carte bancaire. Ginny va alors s’embarquer dans un périple qui va lui faire traverser l’Europe et rencontrer une foule de gens inattendus.
Le roman de Maureen JOHNSON propose une jolie vision de l’adolescence, moment des grandes découvertes et des timidités irraisonnées. En suivant les « consignes » de sa tante, Ginny va apprendre à se dépasser, à oser ce qu’elle n’aurait jamais tenté par elle-même, à grandir tout simplement.
Si ce premier roman de Maureen JOHNSON n’a pas le charme du suivant (Suite Scarlett), il en présente néanmoins nombre de caractéristiques communes : une héroïne un peu empruntée, découvrant l’amour et ses affres, un univers un peu bohème et un personnage fantasque qui jouera les initiatrices. 13 petites enveloppes bleues est rafraîchissant et saura séduire les jeunes filles dès onze-douze ans.
«Règle n° 1 : tu ne peux emporter que ce qui tiendra dans ton sac à dos.
Règle n° 2 : tu ne dois emporter ni guides de voyage ou de conversation, ni aucune aide pour les langues étrangères.
Règle n° 3 : tu ne peux pas prendre d'argent en plus, ni de carte de crédit, de chèques de voyage, etc.
Règle n° 4 : pas d'expédients électroniques. Ce qui signifie pas d'ordinateur portable, de téléphone portable, de musique, d'appareil photo.
C'est tout ce que tu as besoin de savoir pour l'instant. Rendez-vous à la Quatrième Nouille.»
Maureen JOHNSON, 13 Petites Enveloppes bleues.
Scripto – Gallimard
360 pages – 13€
Sorti en poche en juin 2010 – Pôle fiction – 6,60€
Titre original : 13 Little Blue Enveloppes – Paru en 2006 – Traduit en français en 2007
L’auteur : Maureen Johnson est née et a grandi à Philadelphie, en Pennsylvanie. Enfant, Maureen lisait sans arrêt, comme beaucoup de lecteurs qui finissent par écrire. Elle a étudié la dramaturgie et l'écriture romanesque à l'Université de Columbia. Avant de pouvoir vivre de sa plume, elle a pratiqué bon nombre de petits boulots de New York à Londres en passant par Las Vegas. Elle vit aujourd'hui à New York avec son mari.
Treize petites enveloppes bleues, son quatrième roman pour adolescents, était le premier publié en France. Suite Scarlett, le second, est paru en 2010.
Site internet : www.maureenjonhsonbooks.com
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23/07/2010
Libérer Rahia (Y. HASSAN)
« Le jour où mon père m’a annoncé que nous quittions définitivement le Maroc, j’aurais sauté au plafond de joie. »
Blandine est en effet ravie de rentrer à Paris après ces quatre années passées au Maroc. Sa mère, elle, l’est beaucoup moins : elle a pris goût à cette vie facile, à ses domestiques, et n’entend pas y renoncer. Croyant bien faire, Blandine va proposer de ramener avec eux Rahia, la fille de leurs domestiques, âgée de treize ans. Ainsi elle pourrait aider sa mère tout en logeant dans la chambre de bonne et allant au collège. Malheureusement, tout ne va se passer comme elle l’imaginait…
Roman à trois voix – celle de Blandine, celle d’Antoine, le fils de la concierge, et celle de David, meilleur ami d’Antoine – Libérer Rahia aborde la question de l’esclavage moderne. Il montre parfaitement la mécanique qui se met en place, dont piégeur et piégé ne parviennent plus à s’extirper. Blandine se sent responsable de la situation de Rahia cependant, elle n’ose la dénoncer car elle a peur des conséquences pour ses parents.
Le roman pose notamment la question de la dénonciation : dénonciation ou signalement ? Où se trouve la frontière ? L’intrigue est un peu légère, notamment quant elle s’avise de mêler une relation amoureuse à l’intérieur du trio d’amis, et la fin est un peu précipitée, mais c’est un roman qui plaira par sa brièveté et son efficacité.
Elle était si triste, quand je lui ai annoncé notre départ, que j’en ai eu de la peine.
- Peut-être pourras-tu venir me voir un jour ? lui ai-je alors dit pour la consoler, tout en sachant que c’était peu probable car ses parents n’auraient jamais les moyens de lui payer le voyage.
Et c’est à ce moment-là que cette idée stupide m’a traversé l’esprit.
Pourquoi, pourquoi ?
Mais qu’est-ce qui m’a pris ?
Jamais je ne me le pardonnerai.
Je n’avais pourtant pas la moindre intention de lui nuire. Au contraire, je pensais bien faire. J’étais même fière de moi. Pauvre pomme !
Yaël HASSAN, Libérer Rahia.
Casterman Feeling
140 pages – 8 €
Paru en 2010
L’auteur : Yaël Hassan est née en 1952 à Paris, passe son enfance en Belgique, finit ses études en Israël, y travaille, puis revient en France quelques années plus tard. En 1997, elle publie son premier roman, Un grand-père tombé du ciel. Viendront ensuite, dans la même collection, Manon et Mamina et Quand Anna riait.
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