16/07/2011
Aggie change de vie (M. FERDJOUKH)
« A droite, il y avait les éclats de voix qui venaient de l’auberge. »
Aggie a quatorze ans et vit de rapines, toujours flanquée de son fidèle ami Orin et de son chien, Mister Bone. A eux trois, ils ont un numéro d’escroquerie bien rôdé. Jusqu’à ce que les trois amis rencontrent Pemberton Rushworth, qui va proposer à Aggie de changer radicalement sa vie.
Drôle de roman que celui de Malika FERDJOUKH ! On y retrouve son univers et ses thèmes de prédilection favoris (l’amitié, l’entraide, la débrouillardise, la marginalité) mais mêlé à un réseau de références littéraires, très prégnant et cependant s’intégrant parfaitement à l’histoire. Il y a de l’Eliza Doolittle dans Aggie, même si l’histoire se déroule à Boston et non à Londres, que ce soit par son franc-parler ou par l’irruption d’un pygmalion…
Avec des personnages attachants, une intrigue joliment troussée, Malika FERDJOUKH propose avec ce roman une lecture aisée et pleine de rebondissements. Et mention spéciale à la couverture, qui fleure bon l'enfance...
- Comment as-tu atterri chez les Hume ? interrogea-t-il à brûle-pourpoint.
Elle plissa le front avec un bref arrêt de mastication.
- Comment qu’vous savez que c’est pas eux, mes parents ?
- Je me suis renseigné.
Entre pain, jambon et bouillon, elle raconta :
- Ils m’ont gardée à ma naissance. Ma mère, Ginnie Barrie, était servante chez eux. Ils la faisaient bosser dur. C’est Poodlespring, le laitier, qui m’a raconté. Même enceinte, elle devait laver la maison de haut en bas, les escaliers, la cour, porter les seaux… A l’accouchement, c’elle qui était lessivée ! L’avait plus de forces. C’est c’qu’il m’a raconté, Poodlespring. Alors,elle est morte, juste quand moi j’suis née, elle avait plus d’souffle…
Malika FERDJOUKH, Quatre sœurs.
Neuf – Ecole des loisirs
95 pages – 8,50 €
Paru en 2010
L’auteur : Malika FERDJOUKH est née à Bougie, en Algérie, en 1957. Elle vit à Paris et a travaillé dans un hôpital d'enfants avant de se lancer dans l'écriture. Elle écrit des romans pour la jeunesse, ainsi que des scénarios pour la télévision.
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11/07/2011
Les Bizarres (V. SIGWARD)
« Esméralda s’est sauvé et j’ai passé mon après-midi à lui cavaler après dans tout le lotissement. »
Un soir qu’il ne parvient pas à s’endormir, Thibault découvre que ses nouveaux voisins ont une fille de son âge. Mais lorsque le lendemain, il se présente à sa nouvelle voisine, elle lui assure n’avoir aucun enfant. Assistés de ses deux fidèles amis, Ginou et Dialo, Thibault va tâcher de comprendre : est-il fou ? somnambule ? ou bien les voisins cherchent-ils à cacher quelque chose ?
Les Bizarres est un roman policier qui cache bien son jeu. Sous ses dehors un peu loufoques, entre le caniche abricot géant de la tante, affublé d’un prénom féminin, le côté gaffeur de Thibault et la gouaille de Ginou, on sourit souvent, suivant presque mollement cette intrigue policière qui n’en est pas vraiment une. Et puis, insidieusement, le roman bascule vers un problème plus grave, qui va faire entrer les enfants dans le monde des adultes avant l’heure.
Thibault le narrateur est un personnage attachant, comme le sont ses camarades, débrouillard et inventif, et il plaira volontiers aux jeunes lecteurs. L’intrigue est facile à suivre, les rebondissements sont nombreux et l’humour est toujours présent, ce qui concourt à faire ces Bizarres un bon moment de lecture.
Il y avait des tas de choses qui clochaient dans cette histoire de fantômes.
Premièrement, les fantômes n’allument pas la lumière de leur chambre, ils n’en ont pas besoin, ils voient dans le noir, exactement comme les chats.
Deuxièmement, les fantômes ne dorment pas avec un tee shirt qui laisse voir leurs cuisses.
Troisièmement, les fantômes ne peuvent pas se servir des choses réelles et j’avais vu la fille ouvrir la fenêtre.
Quatrièmement, un fantôme c’est plus ou moins transparent, on voit au travers. Cette fille, je ne voyais pas au travers.
Cinquièmement, les fantômes, ça se traverse, on ne peut ni les toucher ni les attraper, et j’avais vu l voisin prendre la fille par le bras.
Sixièmement, et c’est le plus important, les fantômes n’existent pas, un point c’est tout.
En tout cas, personne n’a encore réussi à prouver scientifiquement le contraire.
Valérie SIGWARD, Les bizarres.
Souris noire - Syros
125 pages – 5,95€
Paru en 2007 – 2011
L’auteur : Née en 1966, Valérie SIGWARD écrit des romans depuis 1998 et a notamment publié pour la jeunesse Le secret de Phèdre et Médée la magicienne. Elle est également éclairagiste pour des compagnies de théâtre et de danse.
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10/07/2011
La Fille de mes rêves (C. LAMBERT - S. VANSTEEN)
« Pierre Morel – ou plutôt Sangoku-l’aventurier – a le cœur qui bat. »
Afin d’aider sa mère qui les élève seule, sa petite sœur et lui, dans leur HLM de banlieue, Kamel, lycéen banal, est veilleur de nuit dans une entreprise de haute technologie. Cette dernière commercialise Real Dream, un espace virtuel de rencontres auquel on accède par le rêve, grâce à un avatar. Ainsi, il va pouvoir entrer en contact avec sa nouvelle et sculpturale professeur de Français. Mais le problème, c’est que les choses vont se compliquer…
Roman tonique, au suspense haletant, à la fois drôle et profond, le roman à quatre mains de Christophe LAMBERT et Sam VANSTEEN est une vraie réussite. C’est davantage dans un univers fantastique que l’on pénètre avec cette Fille de mes rêves, en ce sens qu’on entre dans une réalité proche de la nôtre, très proche, mais où l’on a basculé dans un univers où l’argent et le virtuel sont partout. Les établissements scolaires sont gérés par de grands groupes privés (le collège s’appelle Francis Bouygues, le lycée Lagardère…) et l’on se réfugie dans le virtuel pour y rêver tranquille, parce « le réel, c’est la porte ouverte aux déceptions, aux visages cernés par une mauvaise nuit, sans compter les soucis et les contingences bassement matérielles ». Pour autant, on continue à rouler en scooter, même si on recourt plus souvent aux gélules alimentaires qu’à la cuisine mijotée…
La narration joue sur plusieurs niveaux, tantôt à la troisième personne pour raconter la trame de l’histoire, tantôt à travers la voix de Kamel pour apporter un contrepoint à la fois lucide et rafraîchissant sur cette société miroir de la nôtre. L’écriture est dynamique, les chapitres courts, et l’on suit sans difficulté les aventures des multiples personnages. L’intrigue policière apporte un surcroît d’intérêt à l’ensemble et fait de La Fille de mes rêves un roman que l’on dévore d’une traite, qui plaira à tous, filles et garçons.
L’unité Watchmen est un service ultra secret. Ses membres, les « veilleurs », ont pour mission de contrôler les rêves des abonnés. Ils travaillent dans une salle bardée d’écran. Chaque songe s’apparente à un programme télé, une chaîne différente. Les techniciens zappent sans relâche. Au moment de la mise en place de Watchmen, il s’agissait de répertorier et d’analyser les habitudes des consommateurs, leurs fantasmes, leurs déviances, pour mieux anticiper la demande et proposer un éventail de décors oniriques toujours plus attractifs. Puis, au fil des semaines, des incidents se sont multipliés. On peut les ranger en deux grandes catégories. Les incidents de type comportemental, tout d’abord. De temps en temps des gens – surtout des hommes – vont un peu trop loin. Un viol virtuel n’est pas un viol, mais quand même… Des clientes traumatisées, voilà une publicité dont la société tient à se dispenser. Quand une telle alerte se déclenche, les veilleurs doivent analyser la situation en quelques secondes et interrompre le rêve avant que l’irréparable ne soit commis. Un simple bouton et « clic », c’est fini.
Christophe LAMBERT-Sam VANSTEEN, La Fille de mes rêves.
Soon - Syros
330 pages – 15,90€
Paru en 2011
Feuilleter un extrait : http://www.syros.fr/feuilletage/viewer.php?isbn=9782748509854
Les auteurs :
Sam VANSTEEN : « Mon rêve, ce serait d’être écrivain »
« Et bien écris » m’a répondu tout naturellement un ami. C’était il y a dix-huit ans. Sous cette impulsion, j’ai donc rédigé mon premier roman. Un thriller policier. Resté depuis dans un carton. Mais après quelques années de persévérance Le Méli Mélo d’Alma et Léo est né aux éditions les Portes du Monde (2003), suivi par Le Guide des Tribus (2005, même éditeur) et par Le Courrier de Lollytop (Hachette jeunesse, 2005) version papier de la chronique que j’animais alors pour Canal j.
Car entre temps je m’étais faite littéralement happer par le monde de la jeunesse et celui de la télévision. Dix ans à Canal j en tant que journaliste et chroniqueuse, puis ensuite journaliste, présentatrice et réalisatrice d’émissions spéciales – notamment jeunesse – pour Equidia, la chaîne du cheval. D’où Acrobate, un roman situé dans le monde équestre et Dino (éd. Manuscrit.com). Enfin c’est un retour vers des strates plus obscures, un roman policier pour adultes, Mémoire Vive, qui a conduit Christophe Lambert à me contacter pour co-écrire avec lui La Fille de mes Rêves afin que je me consacre à la partie enquête.
Écrivain et comédienne, mon autre métier, je suis maintenant installée à San Francisco avec mon mari et ma fille Amy, 4 ans.
Christophe LAMBERT (non, pas l’acteur !) est né en 1969 en région parisienne. Il a suivi des études de cinéma, réalisé plusieurs courts-métrages, travaillé pour la télévision (M6) et dirigé des ateliers vidéo dans les collèges. Il vit actuellement de sa plume.
Dès son premier roman de science-fiction, La Nuit des mutants (1997), dont l’action a pour cadre un bagne orbital, il obtient le Prix Ozone. Depuis, il a publié une quarantaine de romans en littérature jeunesse, parmi lesquels un impressionnant roman-catastrophe, Titanic 2012 (1999), un roman historique sur la guerre de 14-18, L’Or et la boue (2002), Infaillible ! (2007), etc.
Son goût pour les romans d’anticipation sociale en a fait un pilier de la collection « Autres Mondes » chez Mango, avec des romans comme Clone connexion (2002), Petit Frère (2003) ou encore La Loi du plus beau (2004).
Il a récemment effectué une percée remarquée en littérature adulte avec Zoulou Kingdom (2007), Le Commando des Immortels (2008), Vegas Mytho (2010) et surtout La Brèche (2005), qui a remporté un beau succès, et en littérature pour young adults avec Le Dos au mur (2008).
La force de Christophe Lambert est d’intéresser tous les publics, les jeunes comme les moins jeunes, avec des romans à l’écriture cinématographique, dynamiques et intelligents.
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06/07/2011
L'Affaire Lady Alistair (N. SPRINGER)
« Nous ne serions pas dans cette situation déplorable, déclare le plus jeune et le plus longiligne des deux messieurs en grande discussion dans ce petit salon feutré, si vous ne vous étiez mis en tête, à toute force, de la placer dans un pensionnat ! »
Désormais installée à Londres en dépit de l’opposition de ses frères, Enola Holmes a ouvert son propre cabinet de « Spécialiste en recherche ». Bien sûr, il n’est pas question pour elle d’être son propre patron et c’est donc une identité de secrétaire, celle d’Ivy Meshle, qu’elle s’invente pour pouvoir travailler. Et juste son premier client se présente : le docteur Watson, très inquiet pour son ami Holmes…
Après L’Enigme du message perdu, nous retrouvons l’intrépide Enola (alone en anglais) dans le Londres de la fin du dix-neuvième siècle. Cette fois, c’est une jeune fille de la bonne société qui a mystérieusement disparu qu’elle va rechercher et, ce faisant, pénétrer les quartiers les plus pauvres de Londres.
Narratrice de l’histoire, la jeune Enola (elle n’a que quatorze ans) se révèle toujours aussi décidée, aussi sensible également, cherchant désespérément à entrer en communication avec sa mère, et toujours aussi indépendant, évitant tous les pièges que lui tendent ses frères afin de la faire revenir dans le « droit chemin », celui d’une parfaite jeune lady.
Les jeunes filles apprécieront cette héroïne déterminée, qui n’a pas froid aux yeux, écorchée vive et au grand cœur. Une adolescente d’aujourd’hui, en somme…
En la dessinant, je me mettais mieux en tête qui je devais être à présent.
Quand le besoin de croquer quelqu’un à grands coups de crayons me prenait, c’était comme une démangeaison. J’aurais pu dessiner Ivy Meshle, si je l’avais voulu ; ou ma mère, ou Sherlock, ou Mycroft. Et ces portraits, indulgents u féroces, étaient toujours assez ressemblants, n’en déplaise à ma modestie. Une seule personne m’échappait vraiment : Enola Holmes. Je ne parvenais pas à me camper moi-même sur le papier. Bizarre. Ou peut-être pas.
Nancy SPRINGER, L’Affaire Lady Alistair.
Nathan
280 pages – 6,90 €
Titre original : The Case of the Left-handed Lady – Paru en 2007 – Traduit en français en 2007
L’auteur : Nancy SPRINGER a lu et relu les histoires de Sherlock Holmes dans son enfance, et aujourd'hui, a eu le désir de donner vie à un personnage féminin fort qui aurait les mêmes capacités à résoudre les énigmes passionnantes. Spécialiste du détournement de personnages, elle est l'auteur de romans racontant les exploits de Rowan Hood, qui n'est autre que… la fille de Robin des Bois. Elle a obtenu deux fois le Prix Edgar Alan Poe dans la catégorie meilleur roman policier pour jeune adulte. (Source Ricochet)
Site de l’auteur (en anglais) : http://www.nancyspringer.com
03/07/2011
Taourama et le lagon bleu (J. TEISSON)
« La fête de Noël est terminée. »
Orphelin de mère, Taourama a été élevé par sa grand-mère en Polynésie. Jusqu’au jour où son père l’a fait venir en France afin qu’il vive avec lui. Il avait alors neuf ans. Trois ans ont passé, il est parfaitement heureux dans cette autre vie, s’entend à merveille avec sa belle-mère, sa demi-sœur et son demi-frère et vient de recevoir un magnifique cadeau de Noël : un billet d’avion pour aller passer ses vacances à Rangiroa, revoir sa grand-mère maternelle et tous ceux qu’il a laissés derrière lui. Vont alors remonter les souvenirs d’autrefois…
Construit en retour en arrière, Taourama et le lagon bleu raconte l’itinéraire d’un enfant à double culture, mi-européen mi-polynésien. Heureux dans sa vie, parfaitement intégré, le cadeau va permettre de faire émerger ce qu’il croyait enfoui au plus profond de lui et qui fait cependant son essence : son attachement à cet autre pays, à ces autres croyances, à cette autre culture.
C’est le récit d’une intégration qui a dû gommer une partie de certaines choses et qui resurgissent soudain. Narrateur de cette histoire, le jeune Taourama est un personnage attachant, soucieux de toujours trouver sa place, se sachant malhabile mais tentant néanmoins de bien faire. Janine TEISSON a su construire une galerie d’adultes autour de lui, souvent bienveillants, mais pas toujours, qui sauront le guider et l’aider dans son cheminement.
Roman d’odeurs, de saveurs, qui exalte la beauté des îles polynésiennes, sans toutefois masquer une certaine réalité, Taourama et le lagon bleu est un roman juste, optimiste et profond.
Mon copain Isidore m’a envoyé la même carte du lagon bleu chaque Noël, avec presque les mêmes mots : « bon Noël, bonjour de tous les amis, à bientôt j’espère. » Il n’a jamais été très bon pour écrire. A Rangiroa, le choix de cartes n’est pas très varié, et le lagon bleu, c’est ce qu’il y a de plus beau. La première fois, en ouvrant l’enveloppe, ça a été comme si on m’avait donné un coup de poing dans la poitrine. Ce bleu, je le reconnaîtrais entre cent mille. C’est dans ce bleu que je flotte quand je rêve de mon atoll. Même Véronique qui comprend tout ne peut imaginer ce que c’est que d’aller dans le lagon, là où on ne voit la terre que comme un fin trait de crayon au loin. On arrête le moteur du bateau. Le lagon est plat. Les nuages se reflètent dans l’eau. Le silence est total. On est suspendu dans le bleu. Le temps s’arrête. Rangiroa, dans notre langue, ça veut dire « Grand Ciel ». Peut-être qu’un jour mes parents, Eloïse et Benoît connaîtront ça. J’aimerais bien.
Janine TEISSON, Taourama et le lagon bleu.
Tempo - Syros
105 pages – 5,95€
Paru en 2011
L’auteur : Janine TEISSON a vécu son enfance au Maroc, sa jeunesse en Côte-d’Ivoire. Parvenue au milieu de sa vie (statistiquement), après avoir été enseignante, éducatrice, clown, couturière, elle s’est lancée dans l’écriture. Sans doute pour continuer à faire rire, réfléchir ou pleurer, à créer de la beauté, à faire des plans, à aller à l’essentiel ou à la fantaisie. Son goût de la diversité s’exprime dans ses livres qui s’adressent aux adultes, aux enfants, aux adolescents. Joie et gravité, cruauté et tendresse et par-dessus tout plaisir d’écrire pour tous publics se mêlent dans ses nouvelles, contes, récits autobiographiques, romans (contemporains, policiers, SF, romans historiques).
21:49 Publié dans Vie quotidienne | Lien permanent | Tags : syros, tempo, teisson, polynésie, exil, souvenir, adolescent | | Facebook | |